Mitterrand, un jeune homme de droite (Richelle & Rébéna)

Richelle – Rébéna © Rue de Sèvres – 2015
Richelle – Rébéna © Rue de Sèvres – 2015

En 1936, François Mitterrand a 19 ans. Il est issu d’une famille aisée, fervent catholique, brillant dans ce qu’il entreprend. Il mène des études en Faculté de Droit. Il ne sait pas encore s’il se destine à enseigner le droit ou à devenir écrivain. En effet, il a une belle plume et ressent beaucoup de plaisir à écrire.

Puis, il rencontre une jeune fille de 15 et, à défaut de connaître son prénom lors de la première rencontre, la surnomme « Béatrice ». Les jeunes gens ainsi que leurs familles envisagent déjà les fiançailles mais François n’a pas encore fait son service militaire et le père de sa compagne ne peut concevoir que les choses ne deviennent plus sérieuses tant que le jeune homme n’a pas fait ses classes. François abandonne donc ses études universitaires pour effectuer son service. « Beatrice » était jusqu’alors assez réservée vis-à-vis de cette relation ; le départ de François lui permet de prendre du recul et, finalement, de rompre. François Mitterrand n’a pas le temps de digérer la séparation que la Seconde Guerre Mondiale éclate. Il est envoyé sur le front puis, plus tard, fait prisonnier déporté dans un Stalag.

Cela fait un certain temps maintenant que Philippe Richelle s’intéresse aux scénarios politiques. Sa bibliographie comporte des titres tels que « Les coulisses du pouvoir » (Casterman) et « Les Mystères de la République » (Glénat). Il signe également des récits plus engagés (« Libre de choisir » chez Casterman) ou historiques (« Opération Vent printanier » chez Casterman). Quoi qu’il en soit, ses albums sont toujours bien documentés. « Mitterrand, un jeune homme de droite » ne déroge pas à la règle. Les faits sont traités de façon explicite et la narration est à peine romancée. De fait, le lecteur découvre ou redécouvre l’histoire d’un homme qui a marqué de son empreinte l’histoire française. L’album couvre la période allant de 1936 à 1945 et on voit déjà une personnalité très forte s’exprimer. Nous sommes face à un homme exigeant vis-à-vis des autres comme de lui-même. Il est intransigeant, ne sait pas faire preuve de modestie et affiche ses opinions (morales, politiques…) sans aucune gêne. J’ai été surprise de découvrir un homme qui aime séduire les femmes. Le scénario contient une voix-off et des dialogues à part égales. Les marqueurs de temps sont récurrents et rythment le récit au point de le saccader à outrance par moments.

Le scénariste retrace donc les neuf années durant lesquelles Mitterrand a construit, sans intention préalable, ses appuis politiques et relationnels. Bénévole aux Pères maristes durant ses études universitaires, il participe aux manifestations de 1936 contre le Professeur Jèze, le militantisme de Mitterrand se manifeste réellement après qu’il se soit évadé d’un Stalag ; à partir de ce moment, il veille constamment à apporter son soutien aux soldats français emprisonnés en Allemagne. Dès 1942, et alors qu’il assumait jusqu’alors ses positions pro-pétainiste, il glisse progressivement dans le camp de la Résistance (pour ceux que cela intéresse, cette page Wikipedia donne un bon aperçu du parcours de l’ancien Président de la République durant la Seconde Guerre mondiale).

Mitterrand, un jeune homme de droite – Richelle – Rébéna © Rue de Sèvres – 2015
Mitterrand, un jeune homme de droite – Richelle – Rébéna © Rue de Sèvres – 2015

Quant à Frédéric Rébéna, il réalise la partie graphique de l’album. Le dessin est d’une sobriété telle que je me suis posée la question de savoir si cela était volontaire (car cela colle parfaitement à la personnalité tout en retenue de Mitterrand) ou si cela correspondait au style de l’auteur. Après avoir un peu fouillé la toile, je me suis rendue compte que le travail de Rébéna sur « Mitterrand » était similaire à celui qu’il avait produit sur « L’Attrape-livres ». L’ensemble crée une ambiance graphique assez austère et nous tient à bonne distance du personnage principal. De fait, le lecteur reste spectateur de l’histoire qui défile sous ses yeux.

PictomouiUn ouvrage didactique un peu lourd à lire. Je ne reviens pas sur l’intérêt de pouvoir avoir accès à ce genre de travail mais concrètement, j’ai soufflé pendant la lecture. Le récit manque d’entrain. Le scénario est très discipliné, on entendrait presque le bruit d’un froid métronome en arrière fond. Intéressant mais ennuyeux.

La chronique de Laurent Truc.

Extraits :

« De l’indulgence, j’en ai peu pour les médiocres » (Mitterrand, un jeune homme de droite).

« Je commence à me faire une idée de tous les spécimens de jeunes filles qu’il est possible de rencontrer. Celle-ci est un mélange d’agrément physique et de sottise » (Mitterrand, un jeune homme de droite).

« Je me revendique de l’individualisme de Montherlant. Mener une vie libre, ne dépendre de rien, pas même de l’ambition ou de la célébrité » (Mitterrand, un jeune homme de droite).

Mitterrand, un jeune homme de droite

One shot

Editeur : Rue de Sèvres

Dessinateur : Frédéric REBENA

Scénariste : Philippe RICHELLE

Dépôt légal : septembre 2015

ISBN : 978-2-36981-102-2

Bulles bulles bulles…

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Mitterrand, un jeune homme de droite – Richelle – Rébéna © Rue de Sèvres – 2015

Auteur : Mo'

Chroniques BD sur https://chezmo.wordpress.com/

14 réflexions sur « Mitterrand, un jeune homme de droite (Richelle & Rébéna) »

    1. Et qui sait. La sobriété colle parfaitement bien à Mitterrand 🙂 Là où j’ai vu de l’ennui, tu verras peut-être quelque chose de pertinent.
      En fait, j’aime bien quand les « personnages » sont un peu moins distants. Et puis là, bon… à l’époque, il était quand même bien à droite…

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    1. Je ne sais pas dire. D’ailleurs, je reconnais que je n’avais jamais pris le temps d’éplucher son parcours. Etonnée d’apprendre qu’il s’était évadé, étonnée d’apprendre qu’il s’était investit dans des œuvres sociales (aux Pères maristes) et étonnée d’apprendre qu’il était un fin séducteur. Comme quoi… ^^

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    1. Oui, le sujet est intéressant. Après, je ne sais pas si un autre traitement de ce sujet aurait pu être pertinent ou pas. Et puis la finalité n’est pas de rendre l’homme attachant mais d’éclairer le lecteur sur son parcours (ou du moins, sur les premières années de son parcours).

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    1. Disons que le sujet aurait pu être traité autrement. Là, les auteurs déplient une chronologie plate. Manque de rythme et d’entrain dans la narration. La seule chose qui le rende un peu humain est finalement son côté séducteur… étrange

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