
L’histoire que cette maman choisit de raconter à son enfant pendant le long voyage en train qu’ils effectuent parle d’un roi qui vivait en haut d’une montagne. Le pauvre roi n’avait jamais eu la chance de voir la mer.
Madame Hubeau, une vieille dame, est là assise dans le compartiment, à écouter l’histoire pendant que le paysage défile. Soucieuse, elle passe un coup de fil pour s’assurer que tout va bien à la maison. A l’arrivée, personne ne l’attend sur le quai. Elle s’enfonce peu à peu dans la ville qu’elle semble connaître, faisant ses emplettes et s’arrêtant à la terrasse d’un café pour prendre un verre. Elle est songeuse, comme si elle n’était pas à sa place en ce lieu, ses pensées la ramenant sans cesse à Michel (son fils handicapé). Elle appelle de nouveau, toujours le même numéro. « Ce n’est que moi » annonce-t-elle pour rassurer son interlocuteur. Mais à la maison, tout semble bien se passer.
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Trois ans après « Lydie », Zidrou revient sur le thème du handicap mental. L’auteur permet au lecteur d’entrer doucement dans cette histoire en focalisant sur le personnage principal (la vieille dame). Choix pertinent car finalement, la prise en charge de ces adultes handicapés transforme du tout au tout le quotidien de leurs proches. Car le sujet traité ici est bien le quotidien de l’entourage des handicapés et l’impact du handicap sur leurs vies. Ils doivent s’armer de patience et accepter de répéter chaque jour les mêmes mots, les mêmes phrases, les mêmes gestes. Accepter de mettre sa vie entre parenthèse, de stagner, de ne plus attendre le moindre progrès, la moindre acquisition. Être là et se contenter de petits bonheurs simples sans baisser les bras.
– Comment va Michel ?
– Bien. Enfin ! Mieux qu’on ne l’aurait jamais espéré. Il vit sa vie quoi ! Avec ses petites misères et ses grandes joies.
– Et vous Madame Hubeau ?
– Moi aussi… je vis sa vie

Le postulat de départ du scenario assez courant : un accident marque un temps d’arrêt et redistribue complètement les cartes familiales. Zidrou parle du handicap avec justesse sans omettre quelques pointes d’humour qui évite de tomber lentement dans le mélodrame. Il montre également l’importance des rituels quotidien : l’émission télévision que Michel regarde à heure fixe, les questions récurrentes qu’il pose pour s’apaiser, le même tee-shirt (sorte d’objet fétiche, de doudou qui lui colle à la peau) qu’il porte tous les jours, des parties de Puissance 4 qu’il joue quotidiennement, des visites régulières de la famille… A 40 ans, cet homme est redevenu un enfant, totalement dépendant de la bienveillance et de la présence de son entourage, incapable de prendre la moindre initiative, envahit d’angoisse quand il ne retrouve pas les choses à leur place. L’auteur montre enfin ces instants touchants de lucidité. Durant ces moments, les souvenirs affleurent, la conscience de l’état présent tenaille… oui, il y avait une vie avant l’accident, une vie « normale », une vie avec un avenir professionnel et sentimental. Une vie où il était possible de choisir de prendre la voiture ou d’aller voir des amis. Aujourd’hui, il ne reste rien de tout cela ou du moins, l’horizon des possibles est celui d’un petit enfant à qui l’on prend la main pour marcher dans la rue.
Roger (« Jazz Maynard ») illustre cet univers avec beaucoup de douceur. Ses choix de couleurs servent l’histoire à merveille, tout en retenue pour faire ressentir l’affection débordante de cette mère pour son fils. Les couleurs sont vives, permettant également de ressentir tous les contrastes de cette vie, toute la fragilité de cet homme dont la vie a basculé du jour au lendemain, plus que jamais dépendant de ses proches et soumis aux débordements de ses propres émotions.
C’est une belle découverte que je dois à la Mère Noël (aka Noukette). Splendide, touchant, juste, tendre… un album à mettre dans toutes les mains.
Les chroniques de Noukette, Jérôme, Choco, Yvan, Cuné.
Pendant que le roi de Prusse faisait la guerre, qui donc lui reprisait ses chaussettes ?
One shot
Editeur : Dargaud
Dessinateur : ROGER
Scénariste : ZIDROU
Dépôt légal : septembre 2013
ISBN : 978-2-5050-1707-3
Bulles bulles bulles…
Ce titre fait partie des Zidrou que je voudrais lire… En 2016, qui sait?
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Et de mon côté, ce titre me réconcilie avec Zidrou. Alors qui sait, moi aussi, en 2016 je me vois bien découvrir un autre de ses albums. Il y a le « Tourne Disque » qui me tente beaucoup. Je pense que je vais finir par l’acheter 🙂
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Quant à moi je vais bientôt chroniquer Bouffon que j’ai adoré !
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Pas eu le temps de le repérer celui-ci (pas mis dans mes petites listes, j’ai trop de Zidrou en retard !!! 🙂 )
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ahahahaha (pardon je ris !) j’aime que tu aimes Zidrou et cette BD-là est sacrément belle ! Et tu en causes drôlement bien ❤
bisous copine
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Oui, je serais passé à côté de quelque chose si Noukette ne m’avait pas donné une belle occasion de le lire. J’aime beaucoup la manière dont Zidrou aborde le handicap. Très poétique, très tendre… j’y ai retrouvé ce que j’avais aimé dans « Lydie » sans avoir l’impression qu’il y avait des redondances. Beau cet album
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J’ai pris des risques… mais je ne le regrette pas…! Dans mes bras copine…! ❤
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Des risques oui. C’est drôle ce contraste que je ressens d’un album à l’autre. Autant je peux fondre pour un scénario de Zidrou autant je peux m’ennuyer sérieusement. Un chaud-froid permanent 🙂
Merci Noukette, c’est un cadeau qui me touche beaucoup. Et puis tout était préparé avec tant d’attentions… en fait, j’ai commencé à fondre dès que j’ai ouvert le paquet 😀
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je fais toujours confiance à Zidrou ! Et à toi 😉 Passe jolies fêtes, chère Mo !
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Zidrou… jamais je n’ai pu avoir un ressenti mesuré. Ou j’aime… ou je déteste. Fou ça !
J’arrive après la bataille… j’espère que tu as passé de bonnes fêtes de fin d’année. En revanche, je suis largement dans les temps pour te souhaiter une très belle année 2016 😀 😉
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Merci de me rappeler qu’il faut que je le lise.
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Mais avec grand plaisir Val 😀 Quand il s’agit d’albums de cette trempe, c’est toujours agréable de donner des envies de lecture 😀
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Celui-ci je le veux! et sur mes étagères, pour toujours; je ne veux pas l’emprunter à la bibliothèque. Cette BD au titre à rallonge sera mon prochain achat. Je fais de bien belles découvertes grâce aux blogs.
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Comme je te comprends ! Initialement, j’avais emprunté « Lydie ». Et vu le coup de cœur que j’ai eu, je suis allée me l’acheter une fois que j’avais rendu l’exemplaire à la Médiathèque 🙂 Je pense que j’aurais fait pareil avec celui-ci s’il ne m’avait pas été offert 🙂
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Tu me rappelles qu’il faut que je le lise celui-ci aussi !
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Tu verras cette douceur ambiante. On est bien aux côtés de cette famille. Ils sont tendres et touchants. Très beau cet album
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Mère Noël a bien choisi, c’est le Zidrou que j’aime par dessus tout, celui qui investit des thématiques graves avec une finesse et une intelligence qui n’appartiennent qu’à lui.
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Mère Noël a très bien choisi oui… pouvait-il en être autrement ? Je ne suis pas sûre 🙂
Il ne faut pas que je me plante sur le prochain Zidrou que je choisis car j’ai bien envie de continuer à savourer ses travaux comme j’ai savourer ce roi de Prusse 🙂
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Je l’ai lue à sa sortie et quel coup de cœur !
Zidrou est devenu un de mes incontournables !
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J’aimerai pouvoir en dire autant ! Mais j’avance encore à tâtons dans les albums de cet auteur
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