Ces jours qui disparaissent (Le Boucher)

Le Boucher © Glénat – 2017

Il a 20 ans, il est acrobate dans une petite troupe de cirque. Il aime Gabrielle du fond du cœur et il considère ses amis comme la prunelle de ses yeux. Orphelin à l’âge de 4 ans, il a été adopté. Son père adoptif est mort suite à un AVC mais avec sa mère et sa sœur adoptive, ils forment une famille qui rien ni personne ne pourrait séparer.

Il s’appelle Lubin.

Un jour, lors d’un spectacle, Lubin chute. Sa tête heurte le sol en premier mais il parvient à se relever rapidement et finit son numéro. Avant la fin du spectacle, Lubin est de nouveau sur pieds. Plus de peur que de mal… en apparence. Lubin va rapidement se rendre compte que les choses ne sont plus tout à fait les mêmes. Quand il se couche le soir, il ne se réveille pas avant le surlendemain. Et cela se reproduit systématiquement. Jusqu’au jour où Lubin s’aperçoit que durant ses « absences » , c’est un autre lui-même qui se réveille et qui agit. Lubin ne garde aucun souvenir des agissements de son double. Après le trouble, Lubin tente de trouver des solutions. Il laisse un mot à cet autre lui. La réponse, il la verra au réveil. Une vidéo. Les deux Lubin prennent alors l’habitude de communiquer par vidéo interposées. Ils se présentent, expliquent leurs journées, leurs centres d’intérêt. Jusqu’à ce que la présence de l’imposteur se mette à parasiter la vie de Lubin. Il perd son travail, sa petite amie et peu à peu, le temps lui échappe. Cet autre lui ne se contente plus de lui prendre son corps un jour sur deux mais sur des périodes de plus en plus longues.

J’ai l’impression de disparaître

Ouch !

Ça faisait un moment que je n’avais pas été captivée à ce point par un album. Des coups de cœur, j’en ai eu, je ne dis pas le contraire. Mais de là à être totalement absorbée par la lecture au point de ne pas voir le temps passer… ça faisait un moment.

Là, je dois dire que Timothé Le Boucher m’a espantée. Quand j’ai acheté l’album, j’ai feuilleté. Disons que ce que j’ai vu à ce moment-là correspondait mal à l’idée que je m’en faisais. L’album a ainsi végété pendant un mois dans ma bibliothèque, en attendant sa lecture.

Quand je l’en ai sorti, je pensais me lancer pour quelques pages. Il était tard. Je voyais ça comme une petite mise en bouche avant de le reprendre le lendemain, à partir du début. L’histoire s’ouvre sur ce fameux spectacle où le personnage principal chute. Je n’ai pas compris de suite qu’il s’agissait d’un spectacle alors ces cinq premières pages muettes, ces jeux d’ombres et de lumières dans lesquels le costume blanc dénote sur un décor minimaliste fait de noir charbon et de violet foncé. Je n’ai pas compris que dans cette chorégraphie où l’on voit Lubin danser face à son costume (ce dernier semble vivant), il y a là comme une prémonition… comme un présage de ce qui va arriver. Il y a le corps… et l’esprit.

J’ai tout de même mis un peu de temps à me faire à ces silhouettes trop nettes, à ces décors trop bien rangés, ces lignes droites, ces aplats uniformes.

Et puis j’ai côtoyé un peu Lubin, je l’ai accompagné jusqu’à sa première nuit… suivie de son premier réveil… deux jours plus tard. Intriguée, j’ai continué, oubliant l’heure, les choses à faire, les sonneries du téléphone (mais qu’il sonne donc, je rappellerai !). Et j’ai été la première surprise en refermant le livre. Car si Lubin n’a plus la maîtrise du temps qu’il vit, moi je n’avais plus la notion du temps qui passe.

Schizophrénie ? Dédoublement de personnalité ? Manipulation ? Toutes ces questions fusent pendant la lecture. Je vous rassure de suite, les réponses nous sont apportées et l’on referme l’album en étant repu et satisfait.

D’autres questions fusent, sous-jacentes, troublantes. Des questions liées à l’histoire, à ce personnage en détresse qui voit sa vie lui échapper dans les mains d’un autre lui. Ça doit être quand même assez dérangeant de savoir que l’on vit et que l’on agit dans un état de conscience qui nous est étranger. Lubin ne garde aucun souvenir de ce fait son double si ce n’est un rangement un peu plus méticuleux de son appartement, une gestion plus sérieuse de ses papiers et démarches administratives. Mais c’est une bien maigre compensation que de pouvoir « vivre » un jour sur deux, puis un jour sur 10, puis…

Troublant et désagréable cette conscience que le cerveau n’a besoin que d’un simple déclic dû à un choc, un traumatisme ou que sais-je encore, comme si on appuyait sur un interrupteur pour que les connexions se fassent autrement et que d’un coup d’un seul, la personnalité se modifie ou pire, s’efface.

Coup de cœur ! « Ces jours qui disparaissent » n’est que le quatrième album de Thimoté Le Boucher… assurément un auteur à suivre.

Tentée par Faelys, je vous renvoie vers sa chronique.

Ces jours qui disparaissent

One shot
Editeur : Glénat
Collection : 1000 Feuilles
Dessinateur / Scénariste : Timothé LE BOUCHER
Dépôt légal : septembre 2017
192 pages, 22.50 euros, ISBN : 978-2-344-01332-8

Bulles bulles bulles…

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Ces jours qui disparaissent – Le Boucher © Glénat – 2017

C’est déjà le dernier mercredi du mois, c’est donc chez moi que ce pose le rendez-vous de « la BD de la semaine » et je vous accueille toujours avec autant de plaisir. Pour découvrir les pépites des lecteurs :

Khadie :                                 Sabine :                                LaSardine :

Natiora :                                  Mylène :                                  Jérôme :

Moka :                                       Saxaoul :                                 Blondin :

Bouma :                               Blandine :                                 Estelle Calim :

Noukette :                                       Caro :                                      Stephie :

Amandine :                                  Sandrine :                                 Soukee :

Madame :

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Auteur : Mo'

Chroniques BD sur https://chezmo.wordpress.com/

57 réflexions sur « Ces jours qui disparaissent (Le Boucher) »

    1. J’ai totalement fondu pour cet album ! Totalement ! Faelys m’avait sacrément tentée mais il faut dire que je suis ravie qu’elle ait été si tentatrice 😉 😀

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    1. Oui, les dessins sont un peu surprenants. J’avais feuilleté l’album avant de l’acheter et si je n’avais pas eu en tête la chronique de Faëlys, je pense que je n’y serais pas allée 😉

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  1. Je sens que cette semaine encore, ma liste va s’allonger ! Très envie de faire la connaissance de Lubin malgré les dessins qui me semblent un peu froids à moi aussi 😉

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  2. mon libraire me l’a présenté la semaine dernière et elle me faisait déjà envie.
    maintenant il faut que je la trouve car elle était en rupture…

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    1. Je ne vois qu’un truc : un squat dans une librairie. Tu feuillètes mais bon, juste ce qu’il faut. Parce que voilà… en fait, tu lui laisses 10-15 pages pour te convaincre. Et si tu n’es pas curieuse de lire la suite au bout de 10-15 pages… alors tant pis :mrgreen:

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    1. :mrgreen:
      Mais non mais non je ne retire pas ton commentaire. Mais vu que je n’étais pas à l’écran, beaucoup plus simple de tout centraliser ici et puis comme ça, ça permet aux membres du groupe d’avoir tous les liens de façon à peu près organisée 😀

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  3. Hé bé, nous avons parlé du même sujet aujourd’hui 😉
    Timothé Le Boucher se serait-il inspiré de Stevenson?!
    Je note bien sûr, merci pour la découverte !

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    1. Une vision de la folie mise au goût du jour, oui.
      Je n’avais pas fait le parallèle avec Jekyll & Hyde mais d’une certaine façon, tu as raison. Tiens… ça me donne envie de relire l’album de Le Boucher et au passage, de faire le nécessaire pour découvrir enfin Mattotti !

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  4. Aaah, je l’ai feuilleté après avoir lu le synopsis, pas convaincue, quelque peu refroidie par le graphisme, je suis partie avec une autre… tu es convaincante tu sais, je retournerai voir !

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    1. 😀
      C’est fou ce dessin ! On a tous une réaction quasi unanime de dire « non non » en le voyant. Mais le scénario vaut vraiment le coup 😉

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    1. :mrgreen:
      Moi c’est chez Stephie que j’ai appris. Le verbe « goberger » était pour moi inconnu au bataillon jusqu’à mercredi dernier ^_^
      Bonne journée Natiora 😉

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  5. Ca m’a l’air très bien comme album, je suis tentée, même s’il a l’air en rupture actuellement… Le sujet me tente beaucoup, et puis les dessins, on verra bien (on se fait à tout, paraît-il…) !

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  6. bon alors moi, c’est simple, quand y’a « outch », y’a notage!

    je viens de finir le tour des participants, encore de quoi faire cette semaine!
    merci pour l’accueil!

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  7. Et paf ! Une nouvelle BD notée ! Tu en parles tellement bien que ce serait dommage de passer à côté 😉

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    1. Ah !! J’ai été la première surprise. Ça a vraiment du bon ce rendez-vous car sans lui, je crois bien que je n’aurais pas lu cette BD !

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