Fais de moi la colère (Villeminot)

Villeminot © Les Escales – 2018

C’est un ovni littéraire. Un uppercut. Un roman qui fait mal. Qui fait fort. Et beau. Très beau. C’est une fable située au bord du lac Léman. Il y a une jeune fille seule. Orpheline. Il y a un Ogre. Ou plutôt le fils de l’Ogre. Magnifique. Il y a des morts. Par centaines. Anonymes. Il y a une Bête. Enorme et dévorante. Il y a les monstres. Horribles. Il y a la dévoration et la cruauté humaine. En chacun de nous.

« Sommes-nous tous ainsi, habités par des monstres.
Sommes-nous encore des hommes et des femmes ?
Sommes-nous pires que cela ou simplement cela ? »

Il y a la rencontre interdite entre Ismaëlle et Ezéchiel. Une rencontre vertigineuse. Il y a une partie de pêche. Folle. Il y a la colère mêlée au désir. Il y a la révolte. Totale.

J’ai tout aimé dans ce roman et dès les premiers mots. Car c’est un récit qui dit l’humanité, les peurs et la vie. Un récit qui fait penser le monde autrement. Poétiquement. Violemment aussi.

J’ai aimé le personnage d’Ismaëlle plus que tout.

« J’avais cette dureté, cette endurance au mal de notre espèce ; nous, filles – femmes, mères, femelles. Nous, ouvrières, travailleuses ; pécheresses. Corps et âme faits/forgés pour une patience infinie à la douleur – mêmes gestes, répétés à l’infini ; mêmes contractions, pousser, expulser, malgré l’étroitesse du bassin dans nos hanches. Travail. Science immémoriale. »

La langue de Vincent Villeminot est belle. Puissante. Sauvage. Fiévreuse. Différente. Vivante. « Hallucinée» dit la quatrième de couverture. Disons : libre.

J’ai lu ce livre deux fois. A la suite. Tellement j’ai été secouée. Bouleversée… Et j’ai eu drôlement du mal à raconter, à écrire ce billet !

Merci aux 68 pour cette merveille qui me hantera, je crois, longtemps et que je garderai précieusement. Comme un trésor un peu dangereux. Un peu à vif. Un très beau trésor.

Extrait :

« Moi, nous, Ismaëlle ; quelques-uns … On n’obéit plus aux seigneurs, aux ordres. On marche sur les chemins, on traverse des villages. On croise sur nos chemins les restes humains.
Solitaires.
On marche parfois à deux ou trois, pour quelque temps. Mais pour finir seuls.
Des chiens solaires. Des chiens resplendissants. »

A lire les chroniques de Noukette, de Sabine ou de Charlotte « Fais de moi la colère » de Vincent Villeminot fait partie de la sélection des 68 premières fois, éditions 2018. A retrouver sur le site, toutes les chroniques des éditions passées, en cours ainsi que les diverses opérations menées. A lire aussi l’avis de Stéphie.

Fais de moi la colère, Vincent VILLEMINOT, Les Escales, 2018

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