
« Charlotte – alias Charlie – une jolie rousse, organise une expédition afin de retrouver son frère. Ce jeune scientifique, qui a disparu sous terre depuis plusieurs mois, affirmait– au plus grand étonnement de tous – pouvoir prouver l’existence de l’Enfer en s’appuyant sur la théorie de l’évolution de Darwin !
Le petit groupe conduit par Charlie s’enfonce donc sous terre et découvre au fur et à mesure de sa progression que les entrailles de notre planète pourraient bien abriter une autre forme de vie pour le moins inattendue… » (synopsis éditeur).
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En 2011, Dargaud publiait le premier tome d’une série annoncée comme étant un diptyque. Il s’agissait alors de « Voyage en Satanie » avec aux commandes le fameux Fabien Vehlmann (« Les Derniers jours d’un immortel », « Les Cinq conteurs de Bagdad », « Seuls », « Paco les mains rouges » …) et aux crayons : Kerascoët, le duo de dessinateurs formé par Marie Pommepuy et Sébastien Cosset (« Miss Pas Touche », « Donjon Crépuscule » ou encore « Jolies Ténèbres » déjà réalisé avec Vehlmann).
Et depuis 2011, la série était en attente. Pas de suite et donc pas de dénouement… jusqu’à ce mois d’octobre 2016 qui arrive. Les Editions Soleil avaient annoncé la sortie de « Satanie », superbe ouvrage rouge qui contient le diptyque dans son intégralité.

« Satanie » est un récit d’aventure hors du commun, un réel voyage initiatique. Une quête identitaire où convergent les références mythologiques, oniriques, scientifiques. Et si le fait que Fabien Vehlmann puise ouvertement dans l’imaginaire collectif pour construire son scénario, se basant ainsi sur les représentations que l’on peut avoir de l’Enfer comme un lieu hostile, terrifiant où évoluent des créatures amorales, fourbes, vicieuses… il rend également hommage au célèbre roman de Jules Verne (et notamment à Voyage au centre de la Terre) et il s’en faut pour faire également des parallèles avec « La Quatrième Dimension » de Rod Serling. De plus, il fait appel à des connaissances scientifiques, tentant d’expliquer par le jeu narratif la disparition de l’Homme de Neandertal. Son scénario invente ainsi une nouvelle hypothèse et imagine l’existence d’un lieu insolite.
Le duo Kerascoët a contribué au fait que ce récit donne l’impression d’un renouvellement permanent. Jouant avec les couleurs et les paysages aux formes sans cesse réinventées. Il n’y a aucune ligne d’horizon, comme si les personnages évoluaient dans un lieu clos qui pourtant semble n’avoir aucune limite. De nouvelles galeries apparaissent, elles sont aussitôt empruntées par les personnages qui vont de surprises en déconvenues et découvrent les impasses et les ressources de ce monde. On a l’impression de progresser dans un univers vivant, comme un corps qui serait soumis à des mutations permanentes. Ce lieu fascinant enferme pourtant les personnages dans un huis-clos où les notions d’espace et de temps n’existent plus, où la folie des uns et des autres semble prête à surgir à la moindre occasion.
Il y a dans cet album tout un charivari de couleurs. Tantôt vives, tantôt toniques ou tantôt très sombres, elles accompagnent chaque instant de cette épopée dont on ne sait prédire l’issue finale. Un album ludique et prenant. Un régal pour les yeux et pour l’esprit.
Extrait :
« Journal de l’abbé Montsouris. Date inconnue. J’ai décidé de relater notre périple pour laisser un témoignage à qui trouverait ces lignes. Nul ne saurait dire combien de temps Charlie et moi-même pourrons suivre les Sataniens au cœur de cette « forêt retournée », faite de racines géantes. Les notions de jour et de nuit n’ont plus ici aucun sens. Seuls nos brefs moments de sommeil nous permettent-ils de ponctuer notre progression. Quant aux Sataniens, c’est à croire qu’ils ne dorment jamais. Toujours aux aguets, en mouvement, à la manière de requins. Leur respiration elle-même paraît différer de la nôtre, car jamais leur poitrine ne se lève ou s’abaisse. Comme si tout dans ce monde semblait continu, permanent… Ou, pour être plus précis, permanent dans le changement. Car si aucun cycle ne vient rythmer cet univers souterrain, rien ici ne reste pourtant longtemps identique. On croit trouver un havre, et nous voilà déjà contraints de fuir devant des brumes bouillantes. Une racine semble comestible et bien vite, une autre, d’apparence presque identique, s’avère nocive. » (Satanie)
Satanie
Récit complet
Editeur : Soleil
Collection : Métamorphose
Dessinateur : KERASCOËT
Scénariste : Fabien VEHLMANN
Dépôt légal : octobre 2016
128 pages, 22,95 euros, ISBN : 978-2-3020-5386-1
Bulles bulles bulles…
Satanie – Vehlmann – Kerascoët © Soleil Productions – 2016
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