Les Intrépides (Campanella & Mazza)

« São Paulo, Brésil, 1950. Les préparatifs de la Coupe du monde de football battent leur plein, la première depuis la guerre. Vera et Luiz vivent des jours paisibles avec leur père Jorge, cheminot. Le jeune Luiz partage son temps entre l’école, le foot, le cinéma dont il raffole, et son ami Mario, un jeune boulanger émigré d’Italie au Brésil, comme bien d’autres depuis la fin de la guerre et la libération de l’Italie fasciste. Mais un terrible accident vient bouleverser leurs vies : Jorge, le père, est renversé et tué par le déraillement d’un train. L’enquête révèle qu’un défaut d’entretien des rails est à l’origine de l’accident. En signe de protestation, les cheminots décident de cesser le travail, mais la société qui les emploie envoie des briseurs de grève réprimer violemment ce mouvement de contestation. De leur côté, les enfants de Jorge subissent intimidation et menaces… » (synopsis éditeur)

Un pays qui sort d’années troubles. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, le Brésil cherche à se reconstruire. Le régime démocratique en place cherche à asseoir ses institutions et leur garantir la solidité nécessaire pour relancer le pays mais ce dernier est rongé par la corruption. Sur ce fond historique, Andrea Campanella assoit son intrigue qui nous cueille très vite. Un drame familial, le quotidien des classes ouvrières, l’amitié, la culture populaire avec le cinéma et le football (on est en 1950 et le Brésil s’apprête à accueillir la Coupe du monde qui avait été interrompue pendant 8 ans en raison de la guerre), les migrants italiens qui constituent une importante diaspora à São Paulo et le problème de la corruption des institutions publiques comme du secteur privé. Autant de thèmes qu’Andrea Campanella aborde dans ce récit sans toutefois nous y noyer. J’ai assez peu de choses à en dire si ce n’est que le récit est cohérent ce qui permet une lecture très fluide.

Anthony Mazza, à l’origine de la naissance de cette histoire, opte pour la ligne claire. Les teintes chaudes et le rendu légèrement granuleux donnent un vrai charisme à cette ambiance graphique. Quelques coups d’œil en arrière sont parfois nécessaires pour remettre un personnage dans le contexte (certains ont une fâcheuse tendance à se ressembler).

Un très bon duo d’artistes-auteurs. En espérant qu’il y ait d’autres collaborations à venir !

Les Intrépides (one shot)

Editeur : Ici Même

Dessinateur : Anthony MAZZA

Scénariste : Andrea CAMPANELLA

Traduction : Laurent LOMBARD

Dépôt légal : juin 2020 / 120 pages / 22 euros

ISBN : 978-2-36912-063-6

Tati par Merveille (Merveille)

Merveille © Dupuis – 2020

Un petit joyau a débarqué dans les bacs à la fin du mois d’août. Une merveille que dis-je, un Merveille qui nous permet de plonger littéralement dans le monde de Monsieur Hulot. Depuis plusieurs années maintenant, David Merveille revisite avec tendresse cet univers créé par Jacques Tati. Comment ne pas s’émerveiller de la douceur qui règne ici et du charme des illustrations ?

La silhouette de Monsieur Hulot, incarnée à l’écran par Jacques Tati lui-même, s’étale ici en pleine page d’un format d’album aux proportions gourmandes (282 x 295 mm). Alors je ne vais pas m’amuser un personnage que l’on ne présente plus et pour lequel d’autres ont trouvé des mots pour le décrire bien meilleurs que les miens… à commencer par Jacques Tati : « (…) Monsieur Hulot, personnage d’une indépendance complète, d’un désintéressement absolu et dont l’étourderie, qui est son principal défaut, en fait, à notre époque fonctionnelle, un inadapté. »

« Playtime », « Jour de fête », « Les Vacances de Monsieur Hulot », « Trafic » … tout y est de l’univers de Tati.

Illustrations au fusain, au crayon, à la gouache, à l’acrylique, aux pastels et/ou complétées de couleurs numériques ou imprimées en sérigraphies, ces illustrations – réalisées tantôt pour la seule beauté de l’objet ou pour une affiche – s’offrent à nous généreusement.

C’est tout un univers de flâneries, de poésie, de bonne humeur qui s’expose sous nos yeux ravis. La silhouette dégingandée de Monsieur Hulot, longiligne et penchée, ses jambes sans fin et son éternel chapeau vissé sur son crâne nous embarquent dans cette ambiance de vacances et de nonchalance où le temps semble secondaire, très secondaire. Perché sur un toit, un rocher, une chaise-longue, un vélo… Hulot défie les lois de l’apesanteur et nous emporte ailleurs, dans un lieu où l’on pourrait lâcher-prise et ne penser à rien d’autre qu’à caresser les paysages présents de nos yeux.

Douceur graphique qui invite à revisiter encore et encore les albums de David Merveille consacrés à Monsieur Hulot ainsi que les films de Jacques Tati.

Tati par Merveille (Recueil)

Editeur : Dupuis / Collection : Champaka Brussels

Auteur : David MERVEILLE

Dépôt légal : août 2020 / 120 pages / 45 euros

ISBN : 978-2-3904-1013-3

Opération Copperhead (Harambat)

Harambat © Dargaud – 2017

Silence !

Moteur !

On tourne !

Egypte.
C’est la fin des années 70. Sur les rives du Nil, une équipe de tournage film les scènes de l’adaptation du célèbre roman d’Agatha Cristie « Mort sur le Nil » . David Niven, incarnant le Colonel Race, donne la réplique à Peter Ustinov qui s’est glissé dans la peau d’Hercule Poirot. Tous deux savourent cette opportunité de se retrouver. Lorsqu’ils ne travaillent pas, les deux amis prennent plaisir à savourer ensemble un bon thé et à se rappeler quelques souvenirs… en particulier ceux qui les ramènent à Londres en 1943.

A cette époque, la guerre bat son plein. L’espion insaisissable Karlinski échappe aux forces de l’ordre, la belle Véra brise les cœurs, les alertes récurrentes invitent la population à se réfugier dans les abris et Churchill, en fin stratège, veille comme un vieux lion rusé et bienveillant sur son pays. Afin de tromper Hitler, il donne le feu vert à l’ « opération Copperhead » et charge Dudley Clarke (qui a eu l’idée de ce stratège) de coordonner la mission. Dudley contacte David Niven et lui demande d’organiser le tournage d’un film de propagande qui servira de couverture à l’Opération.

L’idée est venue au colonel Dudley Clarke – en visionnant le film de Billy Wilder – qu’un sosie pourrait incarner le général Montgomery pour tromper les nazis. Il en avait alors fait la proposition à Churchill. Le général Montgomery avait un visage bien caractéristique. Il était devenu immanquablement identifiable lorsqu’il avait été nommé à la tête de l’armée alliée. L’armée lui donnait même un petit nom : « Monty ». L’objet de l’opération était de sauver des vies en mobilisant les nazis loin du véritable débarquement. A cette fin, il nous fallait trouver, recruter et former un acteur capable d’être une doublure convenable du général Montgomery et promener cette doublure en Afrique du Nord.

Le dessin est un peu mordant et nerveux, son aspect anguleux et sec me fait un peu penser aux dessins satiriques. Deux scènes se déroulant dans les années soixante-dix bordent comme une parenthèse le récit de ce souvenir vécu par Niven et Ustinov ; l’une introduit le récit et l’autre vient la conclure avec nostalgie et optimisme. Les faits historiques réels sont le ciment du scénario de Jean Harambat qui se plait ensuite à se mettre dans la peau des protagonistes pour revivre les événements.

C’est comme si on y était, comme si le film se déroulait sous nos yeux et que les deux témoins sont devenus des personnages superbement bien interprété par des acteurs de talents. Le film se tourne en permanence. L’histoire est racontée à la manière d’un film (par scène, par bribe) mais toujours de façon chronologique.

On passe d’une scène choisie à une autre, les décors changent et le plateau de tournage est la ville de Londres dans son ensemble. Les scènes sont plus ou moins longues (une demi-douzaine de planches tout au plus) et la complicité entre Niven et Ustinov fait plaisir à lire. Ces deux gentlemen anglais rendent l’atmosphère joyeuse et détendue. Et l’on chemine ainsi de leur rencontre en 1943 au débarquement de Normandie en juin 1944.

Et puis il y a ce côté grandiloquent qu’apporte la présence constante de l’industrie du cinéma de cette période. On entend les radios et les gramophones grésiller, on respire l’air encombré de fumée et de vapeur d’alcool des cabarets.

L’album dispose d’une très belle ambiance graphique pour illustrer ce récit d’espionnage divertissant.

C’est le Prix René Goscinny 2018 (remis lors du Festival International de la BD d’Angoulême) que j’ai eu le plaisir de lire grâce à Price Minister et Rakuten dans le cadre de « La BD fait son Festival » :

Il est demandé d’attribuer une note, alors j’attribue un 15/20 à cet album.

Opération Copperhead

One shot
Editeur : Dargaud
Dessinateur / Scénariste : Jean HARAMBAT
Dépôt légal : septembre 2017
170 pages, 22.50 euros, ISBN : 978-2205-07484-0

Bulles bulles bulles…

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Opération Copperhead – Harambat © Dargaud – 2017

Fondu au noir (Brubaker & Phillips)

Brubaker – Phillips © Guy Delcourt Productions – 2017

Hollywood, au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale.

Charlie Parish est scénariste. Depuis qu’il est revenu du front, Charlie n’est plus le même. Une part de lui-même est resté là-bas, incapable d’accepter les horreurs dont il a été témoin… incapable d’imaginer un lendemain à sa vie. Auteur renommé, il a déjà écrit les scénarii de plusieurs films et a été récompensé pour cela. Mais c’était avant la guerre… Depuis, il est incapable d’écrire plus de deux mots d’affilée. Ses textes, c’est Gil qui les écrit. Gil Mason est celui grâce à qui il est entré dans le métier, celui qui lui a tout appris. Mais Gil est communiste et depuis la terrible « chasse aux sorcières » cet homme est devenu un paria dans le microcosme d’Hollywood. Les deux amis se sont mis d’accord : Gil écrit les textes et Charlie les signe. Leurs faiblesses font leur force.

Il avait perdu la capacité à imaginer ce qui arriverait ensuite. Charlie ne savait plus penser au-delà du prochain verre. Il n’existait plus qu’au bord de l’oubli.

Leur fragile équilibre est quotidiennement mis à mal par leurs frasques d’ivrognes. Tous deux ont déjà sombré depuis longtemps dans l’alcool et le décès soudain d’une jeune actrice en pleine ascension, Valeria Sommers, est le grain de sable qui va gripper la machine. Val était l’actrice principale du dernier film de Charlie et sa mort survient pendant le tournage du film. Charlie est le premier à découvrir le corps de Val ; lorsqu’il découvre des traces de strangulation sur le cou de sa collègue (et compagne), il prend peur et quitte précipitamment les lieux du crime. Le problème, c’est que Charlie n’est pas fichu de se rappeler ce qui s’est passé durant la soirée.

Quel n’est pas son étonnement lorsqu’il apprend qu’elle s’est donnée la mort. « Suicide d’une starlette » titrent les journaux… et Charlie prend peur. Qui a donc maquillé ce meurtre et pourquoi ? Mais surtout qui était au courant qu’il était sur les lieux du crime et doit-il lui-même craindre pour sa vie ?

Séries d’Ed Brubaker & Sean Phillips

Pas simple d’écrire cette chronique parce que l’album sort tout de même de ce que j’ai l’habitude de lire et d’apprécier habituellement. Je sais pourtant que lorsque Ed Brubaker et Sean Phillips co-signent une série, cela donne généralement lieu à des titres remarqués par le lectorat. « Criminal » , « Incognito » , « Fatale » … qui n’a pas au moine une fois vu ces couvertures ? Quant à ceux qui ont mis le nez dans ces albums, d’après ce que j’ai entendu, il est difficile de lutter contre leur effet hautement addictif.

L’intrigue est riche, très riche. Dans un contexte social délétère de chasse aux sorcières, de faux-semblants, de profit et d’industrie cinématographique, ce thriller psychologique prend plaisir à torturer son personnage principal. Ce dernier, un homme brisé par son expérience au front, lutte chaque jour pour garder un semblant de dignité et sauver les apparences. Mais derrière le masque, il n’a plus de libre-arbitre, plus d’ambitions.

Chronique d’une mort annoncée, c’est un peu comme cela que j’ai engagé la lecture de « Fondu au noir » . Je suis entrée dans cet album par la petite porte car il a fallu que je m’accroche fermement au livre au début de ma lecture et que je lutte un peu contre mon envie de le reposer (j’ai notamment été gênée par le fait de ne pas reconnaître de suite les personnages d’une page à l’autre… cela s’estompe au bout d’un moment). Ce récit me conduit loin de ma zone de confort habituelle mais je suis finalement parvenue à entrer dans cet univers crade, corrompu et hypocrite… un milieu qui pourtant peut faire rêver rien qu’à l’évocation de son nom : Hollywood.

A l’instar des personnages, on plonge dans l’alcool, on se vautre dans le luxe et la luxure, les filles faciles et l’utilisation des médias. L’acteur est un produit marketing que l’on façonne de toute pièce et c’est encore plus vrai pour les actrices que les producteurs exploitent à plus d’un titre. Ed Brubaker crée une ambiance électrique et presque dépourvue de toute chaleur entre les personnages. Les rapports humains sont tellement faussés par les jeux d’argent qu’on est sans cesse en train de se demander qui est sincère et qui ne l’est pas. On a l’impression que tout le monde se contente de bouger ses propres pions pour se placer au mieux sur l’échiquier. Les alliances d’un jour se défont le lendemain.

Sean Phillips a affuté ses crayons pour nous faire profiter de cette atmosphère digne des productions américaines de la fin des années 1940. D’ailleurs, on lit cet album comme on regarderait un bon vieux film. Graphiquement, c’est un régal et les couleurs de Elizabeth Breitweiser renforcent le côté réaliste de l’univers graphique.

Alcool, strass et paillettes masquent la crasse de ce milieu. Un roman graphique conséquent et assez prenant dont la sortie en France a coïncidé avec la retentissante « Affaire Weinstein » donnant une dimension plus profonde encore à toute une partie de l’intrigue… Brrrr, on ne peut que constater que les sujets soulevés par le scénariste sont des verrues tenaces qui enlaidissent tous les milieux.

Je suis surprise d’avoir finalement accroché avec ce titre.

Une lecture commune avec Jérôme que l’on partage avec les bulleurs de « La BD de la semaine » . Les liens des participations d’aujourd’hui sont à retrouver chez Stephie.

Fondu au noir

One shot
Editeur : Delcourt
Collection : Contrebande
Dessinateur : Sean PHILLIPS
Scénariste : Ed BRUBAKER
Dépôt légal : novembre 2017
400 pages, 39.95 euros, ISBN : 978-2-7560-9504-2

Bulles bulles bulles…

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Fondu au noir – Brubaker – Phillips © Guy Delcourt Productions – 2017

Holy Wood (Redolfi)

Redolfi © La Boîte à bulles – 2016
Redolfi © La Boîte à bulles – 2016

« Holy wood, le « Bois Sacré », est une sombre forêt de conifères, peuplée de monstres de foire et de vieilles caravanes ; c’est là-bas que naissent les stars de cinéma qui font tant rêver les spectateurs.
Dans l’espoir d’en devenir une à son tour, la fragile Norma vient s’installer dans cette étrange ville-fantôme qui lui permet, malgré l’obscurité ambiante, de se retrouver sous le feu des projecteurs.
Passé les premiers échecs, la frêle jeune femme se retrouve au cœur de l’attention du couple Wilcox, énigmatique fondateur de « Holy wood ».
Grâce à eux, Norma Jeane Baker devient Marilyn. LA Marilyn. Une femme très différente de la véritable Norma. Trop, peut-être ?
Le portrait revisité de Marilyn Monroe dans un Hollywood fantasmagorique, fascinant et inquiétant. » (synopsis éditeur).

Nous avons tous plus ou moins besoin de reconnaissance. Le regard d’un père et d’une mère suffisent à beaucoup. Mais lorsque ceux-ci n’ont jamais été présents, auprès de qui briller ? Combien de regards faut-il pour combler l’absence d’un seul ? Cent ? Deux cents ? Mille ? Jamais suffisamment en tout cas.

C’est avec ces mots que s’ouvre le récit de Tommy Redolfi. Et c’est sur ces mots que l’on fait la connaissance du personnage principal alors même qu’il pose pour la première fois les pieds à Holy Wood, « l’unique endroit qui fait briller un seul visage pour que des millions l’admirent sur écrans géants ». Un personnage effacé, timide, fascinée par le lieux, éblouie par les promesses de carrière qu’il murmure. Jeune femme timide qui peine à parler, butant sur chaque mot, tant elle est impressionnée par tout ce que cela représente et ses ambitions de gloire qu’elle espère atteindre. Le scénariste lui permet de s’appuyer sur la présence rassurante de son propriétaire, un vieil homme reconvertit par la force des choses dans l’industrie cinématographique, mémoire vivante de l’essor de ce lieu et de l’histoire du cinéma.

En s’appuyant sur la lente ascension médiatique de son héroïne, nous passons de la petite prétendante qui va de casting en casting à la charismatique Marilyn Monroe. Le lecteur est aux premières loges pour mesurer les étapes de la métamorphose d’une femme. Tommy Redolfi propose une réflexion sur le monde du cinéma, la manière dont les producteurs façonnent des carrières, modèlent des personnalités pour les rendre conformes aux attentes du public, pour donner du rêve aux spectateurs… Mensonge, profit, vanité, le combat entre ceux qui imposent les règles et les anonymes en quête de gloire est déloyal. Paraître, faux-semblant, séduction sont les rares armes que les prétendants au succès peuvent employer.

– Rien n’est pire que le lieu d’où vous sortez, croyez-moi. De nous, ils ont exploité la laideur… Et ils vont bientôt s’occuper de la vôtre aussi.
– Vous vous trompez. Sauf votre respect, je ne suis pas comme vous.
– Oh, que si ! On a tous un monstre qui sommeille en nous. Et ils ne vont pas tarder à trouver le vôtre

Cet ouvrage aborde aussi les thèmes de la dépression et de la solitude. En effet, la chaleur des projecteurs et la peau dans laquelle se glisse l’acteur ne suffisent pas à panser les maux de l’enfance. Pire encore, elle les exacerbe. Le scénario n’hésite pas à faire appel aux placebos auxquels les uns et les autres ont recourt pour prolonger le vernis dont ils se protègent : médicaments, alcool et autres drogues sont de parfaites prothèses pour écarter les doutes et autres vieux démons trop envahissants. De parfaites béquilles… dont on ne voit les inconvénients que trop tard. L’emploi de métaphore est récurrent, tant dans le récit que dans le dessin. Graphiquement, le trait délicat de Tommy Redolfi caresse les personnages et montre la fragilité de l’héroïne. Son regard, la moue de sa bouche, le léger voutement de ses épaules sont autant d’indications qui accentuent le poids des humiliations dont elle fait l’objet. Les ocres, marrons, jaunes sont les couleurs dominantes, donnant à l’ambiance graphique une chaleur bénéfique tout en faisant ressentir le caractère agressif de ce monde.

PictoOKUn bel album qui, outre le fait de rentre hommage à Marilyn Monroe, ose un clin d’œil à l’album éponyme de Marilyn Manson sorti en 2000 dont l’un des thèmes majeurs était la culture de la célébrité en Amérique. Un voyage surprenant dans un monde impitoyable.

Extrait :

« Je vais te dire où il est, le mal. Le mal, il est dans tout ce fric qu’on perd à cause de tes conneries intellectuelles. Voilà où il est, le mal ! Les gens n’en ont rien à foutre de réfléchir. Ils veulent du cul et de quoi s’marrer ! Il se trouve que t’es bonne là-d’dans, alors contente-toi de faire ce que tu sais faire et laisse les belles phrases aux acteurs ! Et entre nous, je préfère clairement faire rire trois millions de personnes plutôt que d’en faire « réfléchir » quinze ! Et je SAIS qu’t’en penses pas moins ! » (Holy Wood).

Holy Wood

– Portrait fantasmé de Marilyn Monroe –

Editeur : La Boîte à bulles

Collection : Clef des Champs

Dessinateur / Scénariste : Tommy REDOLFI

Dépôt légal : juin 2016

256 pages, 32 euros, ISBN : 978-2-84953-249-2

Bulles bulles bulles…

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Holy Wood – Redolfi © La Boîte à bulles – 2016

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