Mariée par correspondance (Kalesniko)

Mariée par Correspondance
Kalesniko © Paquet – 2004

Kyung est Coréenne. Lorsqu’elle arrive au Canada, c’est pour épouser Monty, un geek de 39 ans, gérant d’un magasin de BD, comics et produits dérivés. Ils ne se sont jamais vus auparavant et la correspondance qu’ils ont entretenue ne leur a visiblement pas permis de percevoir que leurs visions d’avenir n’étaient pas conciliables… ou difficilement.

Les mois passent, ils s’éloignent. Kyung ressent le besoin de sortir de ce cocon étouffant dans lequel son mari l’enferme.

Le hasard d’une rencontre va permettre à Kyung de sympathiser avec Eve, une jeune artiste libérée.

Me voilà plutôt partagée sur cet album. La raison principale est l’huis-clos étouffant créé par Monty, petit geek bourré de complexes et effarouché par le contact avec les gens de son âge. Pour compenser, il rempli sa maison de ses collections de jouets au risque d’en faire un univers kitsch et surchargé qui oppresse Kyung… et le lecteur par la même occasion. Le comportement de Monty, à la longue, m’a agacée et cette relation conjugale artificielle m’a mise mal à l’aise. Leur volonté de se modeler respectivement sonne le glas de leur échec.

La surexploitation de stéréotypes (Monty le vieux célibataire, grand enfant effarouché et puceau jusqu’à sa rencontre avec Kyung , Kyung la femme-objet que Monty tente d’instrumentaliser en trophée exotique, Eve l’artiste libertine qui ne cherche qu’une occasion de se caser…). Bref…

Hormis ces éléments, le livre commence pour moi au moment où Eve fait son apparition et que les liens se nouent entre les deux femmes. Une bouffée d’oxygène entre dans la lecture et cela fait un bien fou (on attendra une centaine de pages tout de même). L’huis-clos va voler progressivement en éclat. La faible harmonie qui s’était créée dans ce couple se contorsionne, Kyung souhaitant voler de ses propres ailes et découvrir ce nouveau pays, se faire des amis.

De son côté, Monty va se débattre et utiliser une énergie folle pour rester en dehors d’une forme de « réseau social nécessaire » à son âge. Sur ce point, il est touchant, mais assez pathétique.

Au niveau graphisme en revanche, j’ai réellement apprécié les ambiances.

PictomouiJe pense être passée à côté de cette lecture, réfractaire à l’acceptation de leur inévitable échec. Une note pathétique teinte cet album pourtant apprécié dans les différents avis que j’ai pu lire.

La chronique de Kroniks, celle de PlaneteBD et une interview de l’auteur.

Quelques extraits :

 » J’ai lu quelque part que les hommes mariés à des femmes blanches parlent de leurs maison, voiture, travail, mais pas de leur femme. Mais les hommes mariés à des femmes asiatiques parlent seulement de leur femme. Je suis un de ces hommes, Kyung. tout ce que je veux c’est parler de toi (…) Tu me rends très heureux… demain je te sors et je te montrerais à tous mes amis. Je veux qu’ils voient ma superbe femme asiatique  » (Mariée par correspondance).

 » Je suis juste la poupée orientale placée entre la poupée troll et la barbie  » (Mariée par correspondance).

Mariée par Correspondance

One Shot

Éditeur : Paquet

Collection : Ink

Dessinateur / Scénariste : Mark KALESNIKO

Dépôt légal : août 2004

ISBN : 9782888902737

Bulles bulles bulles…

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Mariée par Correspondance – Kalesniko © Paquet – 2004

Auteur : Mo'

Chroniques BD sur https://chezmo.wordpress.com/

20 réflexions sur « Mariée par correspondance (Kalesniko) »

  1. Eté en Corée, une fois. Pays tellement bizarre…L’alliance de la carpe et du lapin. J’ai entendu beaucoup d’histoires d’occidentaux qui ont une femme aux Philippines ou en Thaïlande qu’ils vont voir une fois par an. Le monde est décidément très bizarre aussi, globalement…

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  2. Je te trouve ton analyse de cet album de Kalesniko vraiment pertinente. Encore plus quand on a lu « Alex », qui est finalement assez proche de Monty… Immaturité, personnage pathétique, perdu. Je pense que sont utilisation des clichés est totalement volontaire, c’est de la caricature au sens méchant du terme. Pour ma part, j’ai trouvé que cet album touchait son but, à savoir décrire les incompréhénsions culturelles et le côté obscur des personnes (finalement, Monty est peut-être bien plus « humain » que sa femme, mais c’est une question de point de vue). J’ajouterai que je suis un geek et que je ne ressemble pas à Monty… qui lui est un nerd/no-life… (la phase débile du geek) Une p’tite déf > http://www.travailleursduweb.com/2007/12/23/geek-nerd-nolife.html

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  3. Trop de clichés ? volontaire ou pas ? Moi je crois que c’est justement le moteur du récit. Les deux personnages se perçoivent l’un l’autre comme des clichés. Et peu à peu, ils s’enfoncent dans le rôle qu’ils se sont eux-même données pour qu’au bout, ces mêmes clichés volent en éclat et ressurgissent inexorablement (non, je ne trahis pas le récit, ça se sent rapidement). C’est le mythe de Sisyphe appliqués aux chocs des cultures. Quant aux personnages secondaires ou aux situations annexes, ils ne font qu’appuyer cet état. Personnellement, tu l’auras compris, je trouve son récit plutôt ben construit. (même si j’ai une petite préférence pour Alex)

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  4. Je ne suis pas certain que comparer Delisle à Kalesniko soit pertinent. Shenzen/PyongYang/Chroniques Birmanes ne sont pas des fiction, ce sont des « documentaires » (romancés mais tout de même) Kalesniko ne veut pas rendre compte de sa vision d’un pays en cassant (ou pas d’ailleurs) les clichés. Au contraire, son idée est de les utiliser pour raconter l’histoire de 2 paumés qui ont une certaine idée du pays / de l’autre. D’où la justification d’utiliser autant d’images d’Epinal… pour leur tordre le cou 🙂

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  5. le problème des clichés c’est que parfois ils ont quand même méchamment tendance à représenter ce qui se passe dans la réalité (qui ne connaît pas un « cliché vivant » ?). Cette phrase un peu hasardeuse mise à part, j’ai eu pour ma part une perception très différente de Alex (=rien compris, à ne pas lire 😉 ) et de mariée par correspondance. Le souvenir que m’en a laissé le second était un portrait terrible de « loosers ». Huis-Clos à fond ! un caractère tellement sordide qu’il me paraissait même second degré et « humoristique ». je pense quand même que cet album de Kalesniko (et l’auteur lui-même) vaut le coup d’être lu.

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  6. Je n’ai , comme toi, pas été sensible à ce roman graphique. Je dirais même que j’ai parfois été gênée aux entournures. Trop de clichés en effet et les deux personnages ne m’ont pas semvlé sympathiques du tout.

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  7. J’ai été totalement enthousiasmé par cette BD. La deuxième lecture est essentielle pour mettre les caractères en perspectives. Monty est affreux, petit, minus, épouvantable. Et on peut croire que sa femme est mieux mais en fait elle est aussi minus que son époux. Non, vraiment, je le conseils, c’est vraiment une BD top de chez top !

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  8. Je rebondis encore, désolé mais c’est vraiment un auteur que je trouve intéressant. Pour Monty et Alex sont, à quelques différences près, les mêmes personnages. Ils s’auto-excluent de tout rapport humain. Alex encore plus violemment que Monty, qui est un sale type certes, mais qui n’en a pas tout a fait fini avec l’enfance, donc on peut (peut-être) lui pardonner. Ensuite Kyung, qui est quand même un personnage assez detestable elle-aussi. N’oublions pas (pour ceux qui l’auront lu) pourquoi elle est partie de son pays et son but principal. En gros, c’est l’archétype de la profiteuse (cf les dernières pages qui sont assez terrible). Et puis, une question purement rhétorique… Pourquoi les personnages principaux devraient-ils être sympathique ? Les auteurs ont aussi le droit d’imaginer des sales cons profiteurs, égoïste, immatures, lâches et même pas drôle ! Ici c’est une pure caricature de sales cons… et des deux côtés en plus ! Pas de manichéisme dans cet album, sont tous des méchants caricaturaux ! Si on fait abstraction des personnages (d’où une 2e lecture si possible), on se rend compte que le cliché est le thème même du livre.

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  9. Gratuite ?!?! La scène (quasi) finale ?! Ah bah non justement… elle est amené depuis le début cette scène. Les non-dits, le ressentiment de chacun à l’égard de l’autre, la frustration de 2 personnages, toute l’histoire est là. A la rigueur, elle aurait suffit. de De plus, elle se passe justement dans le lieu du cliché. Tout un symbole ! Après effectivement, Kalesniko est un auteur du « mal de vivre », pas facile, facile. Je n’ai pas lu « Pete… », je ne peux pas dire ce que j’en ai pensé… Mais Alex est dérangeant, plus que Marié par correspondance en tout cas.

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  10. Oui mais d’un autre côté, ça montre aussi le caractère pas vraiment glorieux de Kyung qui détruit « l’oeuvre » de Monty. Je ne me fais pas l’avocat de Monty, mais Kyung ne vaut pas mieux que lui. Effectivement, elle suscite pas mal de discussion. Comme quoi, elle est certainement beaucoup plus riche qu’un catalogue de clichés… 🙂 (argument impitoyable)

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  11. C’est vrai que les personnages principaux sont un peu stéréotypés mais malheureusement, j’ai eu l’occasion de voir que ces stéréotypes étaient réels (et donc pour moi, tout à fait crédibles !). Et puis, le personnage de Kyung sort un peu de ces clichés alors que Monty s’y enfonce. Je crois que c’est aussi intéressant de voir qu’aucun des personnages n’est sympa : ils ont tous des défauts, souvent imposés par leurs vies !

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    1. je crois que je suis restée trop « collée » à la lecture. Mais la prise de recul m’étais assez difficile. Je n’envisage pourtant plus de relire cet album. Dommage aussi que le transfert des articles d’une plateforme à l’autre ait supprimé des commentaires. J’avais eu un échange intéressant au sujet de cet album.

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    1. Tu sais que cette lecture me reste encore en travers de la gorge aujourd’hui. Je me dis que ça mériterait une relecture mais 1/ j’ai tout de même assez peu d’occasion de croiser cet album (il faut dire que je ne force pas le destin non plus) en librairie et 2/ il y a toujours d’autres livres qui me tentent bien plus et vers lesquels je préfère me tourner…

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