Mon coeur pédale (Boulerice & Leduc)

Boulerice – Leduc © La Pastèque – 2017

Simon vit heureux avec ses parents. Il a 11 ans. Sa bouille ronde, ses grands yeux, sa houppette et son sourire radieux donnent envie de serrer le gamin dans nos bras. Ses grosses lunettes rondes lui mangent la moitié du visage. Il est attendrissant. Amoureux de sa vie et des petites habitudes du couple parental, il profite pleinement de chaque instant. Simon est hyper-sensible aux odeurs des vêtements de travail de son père qui travaille dans une usine où l’on fabrique du plastique. Mais ce qu’il aime plus encore, c’est l’odeur de sa mère. Un mélange de parfums associé à l’odeur du cuir propre aux voitures neuves que sa mère vend.

Simon est aussi très attaché à sa tante. Son père l’emmène voir cette dernière en cachette car la mère de Simon est en froid avec sa sœur.

Elles ne se parlent plus depuis l’année passée. Je n’ai pas tout à fait saisi la raison de leur chicane. Je sais seulement que matante Chantal a acheté une voiture ailleurs qu’au concessionnaire de maman. Chez Ford, il me semble. Elle s’est acheté une voiture sport turquoise maladement belle. Une voiture comme je n’en ai jamais vu.

Un jour, Simon découvre avec émotion que les deux femmes se sont réconciliées. Ce jour-là, Chantal arrive chez lui dans sa voiture rutilante. Elle a prit sa valise. Elle va rester avec Simon pendant un mois, le temps que les parents de l’enfant profitent de leur voyage en Europe. C’est le début d’une période bénie. Simon est aux anges. Sitôt sorti de l’école, il profite de chaque instant passé avec sa tante. Il est heureux, s’épanouit et gagne une maturité nouvelle. Il se surprend à formuler spontanément ce qu’il éprouve.

« Matante Chantal
Ma beauté fatale
Quand je te vois
Mon cœur pédale »

Sous la plume de Simon Boulerice, un petit garçon grandit, s’affirme et s’éveille à la vie sous un jour nouveau. Il gagne en prestance, en confiance… Il ressent des sentiments qui lui font voir les choses autrement. Il serait capable d’abattre des montagnes pour voir le regard attendri que sa tante pose sur lui. Mais nul besoin d’aller décrocher la lune pour que sa tante le remarque. A chaque instant, elle est là, à l’écoute, toujours partante pour chanter avec lui à tue-tête, partir se balader en voiture, plonger dans la piscine ou regarder un film avec son neveu. L’enfant est sensible à la tendresse bienveillante que sa tante a pour lui. Il est troublé, il sent une force nouvelle en lui qui modifie sa perception du monde. Il est transcendé.

Le récit aborde le sentiment amoureux sans jamais le nommer mais on comprend sans aucun doute qu’il s’agit de passion. Un petit homme très touchant, hypersensible et généreux. Il baigne encore totalement dans le monde de l’enfance et vit cette période en occultant totalement le fait que sa tante a sa vie en dehors de lui. Une vie d’adulte peuplée de rencontres qui attirent sa tante vers d’autres horizons, à la grande déception de l’enfant.

Les illustrations d’Emilie Leduc sont douces. Leurs contours parfois charbonneux montrent toute la fragilité et la naïveté de l’enfant. Elles nous emmènent dans un monde aux repères encore imprécis, un monde à fleur de peau où tout n’est que ressenti et émotions. Ce monde, c’est celui d’un enfant en devenir et qui découvre la vie, un petit bonhomme qui se cherche et découvre, béat, de nouvelles facettes de lui-même.

La voix de Simon est touchante et on se laisse porter par la joie qu’il ressent à partager ces moments avec sa tante. Il profite de ce petit bonheur simple qui lui est offert, il vit au jour le jour et nous offre un retour en enfance. Une jolie petite bulle d’insouciance que je vous invite à lire.

Il y a d’autres petites pépites à découvrir aujourd’hui chez Moka qui accueille la « BD de la semaine« .

Extraits :

« Je cherche le mot « réconciliation » dans le Larousse 1988 et la définition n’arrive pas à la cheville de ce que j’ai à peu près vu entre les barreaux d’escaliers » (Mon cœur pédale).

« Petit à petit, au contact de matante Chantal, je deviens beau. Je gagne en grâce. La beauté de Chantal sur moi irradie sur ma peau. Chantal m’amincit. Je deviens rutilant, comme une bagnole » (Mon cœur pédale).

« Je cherche le mot « complicité » dans le Larousse 1988 et la définition n’arrive pas à la cheville de ce qui circule entre matante et moi » (Mon cœur pédale).

Mon Cœur pédale

One shot
Editeur : La Pastèque
Dessinateur : Emilie LEDUC
Scénariste : Simon BOULERICE
Dépôt légal : avril 2017
104 pages, 21 euros, ISBN : 978-2-89777-013-6

Bulles bulles bulles…

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Mon cœur pédale – Boulerice – Leduc © La Pastèque – 2017

Auteur : Mo'

Chroniques BD sur https://chezmo.wordpress.com/

30 réflexions sur « Mon coeur pédale (Boulerice & Leduc) »

    1. Un univers très doux. je ne connaissais Simon Boulerice que de nom et je n’avais jamais fait le pas de lire un de ses œuvres. Très beau. Il y a une petite poésie ici qui m’a beaucoup plu 😉

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  1. Ah ben moi je ne suis pas fan des illustrations, trop claires, trop diaphanes, trop ternes… Je préfère quand il y a de l’encrage de toute façon 🙂

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    1. Alors en fait, je n’ai trouvé absolument aucun visuel en ligne excepté celui qui est sur le site de l’éditeur (la quatrième planche qui est dans le diaporama en bas d’article, celle où dominent des tons roses avec la tante qui écoute de la musique). Du coup, j’ai du faire des scans moi-même et mon scan a étouffé les couleurs (mais vraiment !). Sniff

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    1. Je crois qu’il va falloir que je me penche plus sérieusement sur sa bibliographie. Je vais déjà commencer par voir ce qui est disponible en France 😉

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    1. Certes… mais si tu as l’occasion, je t’invite vraiment à feuilleter l’album. Je n’ai pas trouvé de visuels en ligne. J’ai donc du faire des scans et ceux-ci ne servent vraiment pas l’album. Ils ont étouffés les couleurs et franchement, en les regardant… ben ça ne me donne pas envie non plus de lire l’album 😉

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    1. Oui il me semble qu’on avait eu l’occasion de parler de ce titre aussi. Du coup, je me dis qu’on a dû le faire à partir de FB, je ne vois que ça

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