Ce que le jour doit à la nuit (Khadra)

Khadra © Pocket - 2009
Khadra © Pocket – 2009

Younes est âgé de 10 ans lorsque sa famille décide de quitter leur terre. Jusque-là, son père se tuait la santé aux champs, tentant en vain de sauver ses récoltes pour assurer à sa famille le minimum vital. Mais un drame les contraint à s’installer à Jenane Jato, quartier pauvre d’Oran où malgré l’acharnement du père, la famille ne cesse de s’enfoncer dans la misère.

A l’âge de 11 ans, Younes est confié à son oncle paternel qui l’adopte. Il s’appellera désormais Jonas, découvre le quotidien d’une famille aimante et les joies de l’école où il apprend à lire, à compter…

« Et Jenane Jato me parut plus atroce qu’avant. Ici, le temps tournait en rond. Sans suite dans les idées »

L’enfant s’épanouit et un déménagement à Rio Salado ne viendra pas écorner son bien-être. Il y fait la connaissance de Fabrice, Simon et Jean-Christophe qui deviendront de précieux amis.

Qu’il est facile de se laisser porter par la plume de Yasmina Khadra. A peine la lecture est-elle engagée que déjà le lecteur s’imprègne de l’univers qui s’offre à lui. Les paysannes s’étirent à perte de vue, les personnages s’animent, la brume qui enveloppait leur visage se dissipe progressivement. Le lecteur trouve naturellement sa place dans ce décor qui lui est pourtant étranger.

L’histoire qui nous est présentée débute dans les années 1930. Elle se referme en 2008. Durant ce laps de temps, nous allons observer la vie d’un homme ; le voir grandir, assumer ses premiers choix, se responsabiliser, se frotter à la question des sentiments et à celle de la sexualité. Au même moment, l’Algérie se transforme profondément. Dans un premier temps, cette colonie française envoie ses hommes au front de la guerre qui gronde en Europe alors même que des hommes commencent à s’élever contre la domination française ; les premières revendications d’indépendance commencent à se faire entendre. Puis vinrent les manifestations où sont exprimées les revendications nationalistes et la Guerre d’Indépendance. Yasmina Khadra a pourtant choisit de ne pas aborder les événements de manière frontale. Alors que l’Algérie s’enfonce de plus en plus dans la lutte armée, les événements sont abordés avec distance : le narrateur y prête peu attention, le conflit ne fait pas partie de son quotidien (la ville où il réside n’est pas un terrain de bataille… elle ne le sera qu’en 1962, année de l’Indépendance). Les pensées du narrateur sont accaparées par une jeune femme et l’auteur a l’art et la manière de décrire le sentiment amoureux, les questions inhérentes à ce dernier… D’un bout à l’autre du roman, on ressent une réelle empathie pour cet homme, on s’agace avec lui de ses hésitations et de ses doutes.

Outre l’histoire amoureuse, l’ouvrage aborde également le thème des origines. Le narrateur est en quête d’identité. Homme double : il est à la fois Younès (enfant naturel d’une famille algérienne pauvre vivant parmi les nécessiteux) et Jonas (enfant adopté d’une famille pluriculturelle aisée vivant parmi la diaspora des générations étrangères qui se sont installées sur le sol algérien). Enfant, on ne lui offre rien d’autre qu’une vision très étriquée du monde ; il ne connaît alors que la petite maison familiale perdue au beau milieu de nulle part et rien n’existe en dehors de ce qu’il peut voir. Le déménagement à Oran lui ouvre les yeux sur de multiples possibles, son adoption puis sa scolarisation lui en offriront bien davantage. Arabe aux yeux bleus, Younès-Jonas se glisse avec aisance dans les différents groupes d’amis qu’il va rencontrer tout au long de son existence. Il se construit autour de cette dualité qui le représente sans qu’il en prenne réellement conscience. Sur le tard, il comprendra comment certains individus peuvent percevoir sa double appartenance et en quoi celle-ci peut éventuellement créer de la jalousie auprès de ses compatriotes qui n’ont d’autre choix que de rester au bas de l’échelle sociale.

La majeure partie du récit est narrée, les dialogues s’immiscent régulièrement et donne un rythme plus cadencé à l’ensemble pourtant, à aucun moment, les longs monologues de la voix-off ne deviennent pesants. S’il est essentiellement question de son quotidien, le narrateur se découvre en permanence par le biais des autres et des regards qu’on lui porte. A aucun moment il ne parviendra à prendre une décision en son âme et conscience… il a besoin de penser l’intérêt de l’autre avant toute chose et fait preuve d’un altruisme en toute circonstance, au point de reléguer son propre bien-être au second plan.

PictoOKCe que le jour doit à la nuit est le quatrième roman de Yasmina Khadra qu’il m’ait été donné de lire. Petit bémol me concernant, relatif au contenu du dénouement ; il me semble effectivement que l’auteur réinjecte tardivement un personnage secondaire et ne prend pas la peine d’aider le lecteur à comprendre un des éléments-clé de l’intrigue principale. Il me reste encore un certain nombre de ses œuvres à découvrir mais je pars confiante ; je suis gourmande à l’idée d’explorer encore sa bibliographie. Les expériences de lecture que nous offre cet auteur sont réellement appréciables.

Une nouvelle lecture commune que j’ai le plaisir de partager avec Kikine.

Pour lire sa chronique, cliquez sur ce lien.

Extraits :

[à son arrivée à Oran] « Je n’en revenais pas, ne savais même pas mettre un nom sur les choses qui me sautaient aux yeux comme des flashes. (…) Il émanait, de ces endroits privilégiés, une quiétude et un bien-être que je ne croyais pas possibles – aux antipodes du relent viciant mon bled où les potagers rendaient l’âme sous la poussière, où les enclos à bestiaux étaient moins affligeants que nos taudis. J’étais sur une autre planète » (Ce que le jour doit à la nuit).

« Bien entendu, il est des choses qui nous dépassent, mais, dans la plupart des cas, nous demeurons les principaux artisans de nos malheurs. Nos torts, nous les fabriquons de nos mains, et personne ne peut se vanter d’être moins à plaindre que son voisin. Quant à ce que nous appelons fatalité, ce n’est que notre entêtement à ne pas assumer les conséquences de nos petites et grandes faiblesses » (Ce que le jour doit à la nuit).

« Aime de toutes tes forces, aimes comme si tu ne savais rien faire d’autre, aime à rendre jaloux les princes et les dieux… car c’est en l’amour que toute laideur se découvre une beauté » (Ce que le jour doit à la nuit).

Ce que le jour doit à la nuit

Roman

Editeur : Pocket

Auteur : Yasmina KHADRA

Dépôt légal : septembre 2009

ISBN : 978-2-266-19241-5

Chroniks Expresss #8

Les Filles de Montparnasse, tome 2 – Nadja © Olivius – 2013

Je partageais récemment mon avis sur le tome 1 de cette série. Vous dire que j’avais aimé est un doux euphémisme…

Nadja © Olivius – 2013
Nadja © Olivius – 2013

Suite de la découverte de cette tétralogie de Nadja où l’on cherche un peu notre souffle et nos repères. On découvre donc comment Elise fait face au chantage de son producteur. On la voit perdre pied. Avec la drogue, elle essaye d’oublier qu’elle n’est plus qu’un simple objet sexuel. Tarkan lui déclare enfin sa réelle identité (et la nature des liens qui les unit) mais Elise l’écarte sans même se rendre compte du soutien qu’il pourrait lui offrir. Garance quant à elle fuit l’Académie de peinture et vit recluse dans l’appartement. Elle semble ne pas accepter que les sentiments qu’elle a envers son mentor ne soient pas réciproques. Elle s’obstine à peindre des natures mortes, au grand désespoir de Rose-Aymée, son modèle, qui n’a pas d’autre alternative que de se morfondre à son tour. Amélie enfin fulmine depuis qu’elle a découvert que l’auteur qu’elle avait secondé en tant que correctrice, s’est abondamment inspiré des confidences qu’elle lui avait faites pour écrire son dernier roman à succès.

Nous sommes donc en présence de plusieurs intrigues qui se déconstruisent. Excepté pour Rose-Aymée qui est de loin le personnage le moins développé de l’univers (est-ce un leurre ?), les trois autres héroïnes sont mises à mal. Leurs vies s’éparpillent, de nouvelles facettes de leurs personnalités nous apparaissent et les quelques repères que les lecteurs s’étaient construits jusque-là volent en éclats. Une grande agitation domine donc les deux premier tiers de l’album. Lorsque le rythme s’apaise, cela laisse au lecteur l’occasion de réorganiser les pièces du puzzle narratif. On profite également de très belles scènes muettes, notamment celle où Tarkan s’engouffre dans les boulevards haussmanniens, nous laissant ainsi profiter de magnifiques paysages urbains. Un moment apaisant, des planches d’une luminosité incroyable.

PictomouiPourtant, je suis moins emballée par ce tome que je ne l’avais été par le précédent. Peut-être un manque de respiration durant la lecture qui m’a amenée à lire cet ouvrage de manière presque compulsive, emportée par le rythme et ne parvenant pas à me détacher de cet enchainement rapide des différentes actions. Il y a quelques moments suffisamment intenses pour marquer des moments forts de l’album mais dans l’ensemble, j’ai été assez déstabilisée par le réel lâcher prise de ces jeunes femmes. On perd notre souffle.

Pour autant, j’ai très envie de découvrir le tome trois qui est en vente depuis le début du mois. A suivre… mais cela attendra mon prochain passage en librairie (snif).

Les hirondelles de Kaboul – Yasmina Khadra © Pocket – 2010

Khadra © Pocket – 2010
Khadra © Pocket – 2010

« Dans les ruines brûlantes de la cité millénaire de Kaboul, la mort rôde, un turban noir autour du crâne. Ici, une lapidation de femme, là un stade rempli pour des exécutions publiques. Les Taliban veillent. La joie et le rire sont devenus suspects. Atiq, le courageux moudjahid reconverti en geôlier, traîne sa peine. Le goût de vivre a également abandonné Mohsen, qui rêvait de modernité. Son épouse Zunaira, avocate, plus belle que le ciel, est désormais condamnée à l’obscurité grillagée du tchadri. Alors Kaboul, que la folie guette, n’a plus d’autres histoires à offrir que des tragédies. Quel espoir est-il permis ? Le printemps des hirondelles semble bien loin encore… » (synopsis éditeur).

Yasmina Khadra a réalisé trois ouvrages, une sorte de trilogie sans autre point commun que le fait d’aborder la question de l’extrémisme au Moyen-Orient. Le lecteur ne trouvera pas de personnage-clé qui pourrait servir de fil conducteur aux trois titres.

C’est donc aux côtés de L’Attentat et des Sirènes de Bagdad que Les hirondelles de Kaboul trouvent naturellement leur place dans cet univers engagé.

Dans un pays où les cimetières rivalisent avec les terrains vagues en matière d’extension, où les cortèges funèbres prolongent les convois militaires, la guerre lui a appris à ne pas trop s’attacher aux êtes qu’une simple saute d’humeur pourrait lui ravir.

Un récit d’une grande richesse qui traite aussi bien de la condition de la femme que de la religion ou de l’influence haineuse des talibans. Le lecteur avance à pas feutrés dans sa lecture. A l’instar des personnages du roman, il plie sous le poids des conventions sociales, de l’insécurité, des suspicions et de la peur. Avec émotion, on découvre le regard de ces hommes et de ses femmes qui parlent à voix basse de la nostalgie d’un passé révolu…

… je refuse de porter le tchadri. De tous les bâts, il est le plus avilissant. Une tunique de Nessus ne causerait pas autant de dégâts à ma dignité que cet accoutrement funeste qui me chosifie en effaçant mon visage et en me confisquant mon identité. (…) Avec ce voile maudit, je ne suis ni un être humain ni une bête, juste un affront ou un opprobre que l’on doit cacher telle une infirmité.

… et sont accablés par la dure réalité qui s’impose à eux.

Vivre, c’est d’abord se tenir prêt à recevoir le ciel sur la tête. Si tu pars du principe que l’existence n’est qu’une épreuve, tu es équipé pour gérer ses peines et ses surprises. Si tu persistes à attendre d’elle ce qu’elle ne peut te donner, c’est la preuve que tu n’as rien compris.

Comme pour L’Attentat, je me suis délectée du style d’écriture de Yasmina Khadra. On se représente parfaitement l’architecture d’un lieu, les atmosphères, les odeurs… Tout est présent jusqu’au moindre détail et sans que cela n’alourdisse le propos.

La musique est le véritable souffle de la vie. On mange pour ne pas mourir de faim. On chante pour s’entendre vivre.

PictoOKPictoOKUne lecture marquante que j’ai très envie de conseiller.

Du côté des challenges :

Petit Bac 2013 / Animal : hirondelles

Petit Bac 2013
Petit Bac 2013

Nos étoiles contraires – John Green © Nathan – 2013

Green © Nathan - 2013
Green © Nathan – 2013

« Hazel, 16 ans, est atteinte d’un cancer. Son dernier traitement semble avoir arrêté l’évolution de la maladie, mais elle se sait condamnée. Bien qu’elle s’y ennuie passablement, elle intègre un groupe de soutien, fréquenté par d’autres jeunes malades. C’est là qu’elle rencontre Augustus, un garçon en rémission, qui partage son humour et son goût de la littérature.

Entre les deux adolescents, l’attirance est immédiate. Et malgré les réticences d’Hazel, qui a peur de s’impliquer dans une relation dont le temps est compté, leur histoire d’amour commence… les entraînant vite dans un projet un peu fou, ambitieux, drôle et surtout plein de vie » (synopsis éditeur).

La pluie d’avis positifs qui a inondé la blogosphère en début d’année m’avait convaincue avant même que je débute la lecture. Je m’attendais à un ouvrage d’une rare intensité et la lecture a été à la hauteur de mes attentes.

Avec beaucoup de naturel et en toute simplicité, John Green nous accueille dans le quotidien d’Hazel Grace Lancaster, « malade professionnelle » (mais je ne fais que reprendre les termes de la narratrice). J’appréhendais que les propos ne soient condescendants ou ne flirtent de manière un peu trop effrontée avec le pathos mais le récit évite tout à fait ces écueils.

330 pages pour passer du rire aux larmes, d’une théorie audacieuse d’un jeune adolescent sur le devenir d’une balançoire au projet fou d’une cancéreuse en phase terminale de partir à plus de 7000 km de chez elle… et donc de l’équipe médicale qui la suite. Il est question de vie et de mort, on est sans cesse sur la brèche mais diable, que cette lecture est pétillante ! Que d’émotions, quelques pleurs épars, des rires fréquents mais surtout, un vif intérêt à l’égard de ce roman et puis, en vrac :

  • Un roman finalement assez court (330 pages).
  • Des ados qui regardent la mort dans les yeux, qui en parlent, qui en rient, qui en ont peur.
  • Les derniers chapitres plus courts, donnant l’impression que le rythme s’accélère et que ces enfants vivent une course contre la mort.
  • Une impériale affliction : le roman dans le roman.
  • Une légère déception quant au contenu de la lettre finale.

Les mots ne sont visibles que dans l’œil dénué de paupière de la mémoire. Dieu merci, les vivants conservent l’aptitude de surprendre et de décevoir.

PictoOKPictoOKMerci à tous les lecteurs qui ont partagé leur chronique et m’ont rapidement donné envie de lire cet ouvrage à commencer par Noukette, Stephie, Hérisson, Leiloona et la chronique qui a m’a définitivement convaincue chez Jérôme.

L’attentat (Khadra)

L’attentat – Khadra © Pocket - 2011
L’attentat – Khadra © Pocket – 2011

« Amine Jaafari est palestinien. Il a obtenu la nationalité israélienne et exerce en tant de chirurgien dans un hôpital de Tel-Aviv. Amine est bien intégré ; il est marié et vit dans un quartier bourgeois de la ville. Enfin, il a de bons rapports avec ses collègues et de nombreux amis, y compris dans la police.

Amine a une bonne situation, une bonne réputation… Jusqu’à ce jour où sa vie bascule. Ce jour maudit où un kamikaze se fait exploser dans un restaurant de la ville. Ce kamikaze, c’est sa femme. Après le choc de la nouvelle, le médecin passe par différents stades, de la consternation à la colère.

Ce n’est pas mon épouse. Ce n’est pas elle. Je la connais, ce n’est pas elle…

Il a besoin de comprendre les raisons qui ont poussé sa femme à devenir une martyre de la cause palestinienne. Comprendre ! Cet objectif va devenir pour lui une obsession au point qu’il décide de mener sa propre enquête. Il souhaite poser ses questions aux leaders des mouvements extrémistes…

Je n’ai pas l’intention de me venger ou de démanteler le réseau. Je veux juste comprendre comment la femme de ma vie m’a exclu de la sienne »

(synopsis proposé à l’occasion de ma chronique BD).

La construction de ce roman est sensiblement différente de celle de son adaptation en bande dessinée parue l’année dernière. En effet, si le roman choisit de nous dévoiler dès le prologue ce qu’il advient du personnage principal après la quête qu’il entreprend après le décès de sa femme, la bande dessinée fait le choix de ménager cet élément narratif… préservant ainsi totalement le dénouement final.

Dans un cas comme dans l’autre, le récit nous emporte dans le tourment de cet homme et dans le cheminement qu’il va effectué. Etape par étape, nous l’accompagnons dans la difficile acceptation d’une réalité qui lui semblait jusque-là improbable et dans la difficile assimilation de sentiments qui le tiraillent.

Sortir pour aller où ? La rue ne m’attire pas. Que vais-je y trouver de plus qu’hier ? Certainement beaucoup moins. Inutile d’essayer de se réconcilier avec les choses familières lorsque le cœur n’y est pas.

S’il est bien une chose qui ne m’avait pas autant interpellée dans la BD, c’est la vertigineuse descente aux enfers que fait cet homme. Dans l’œuvre originelle de Yasmina Khadra, il déraisonne tant et si bien qu’on imagine que la folie sera son seul refuge. Je ne l’avais pas perçu ainsi en lisant la bande dessinée.

Mais ce n’est pas tout. Durant toute ma lecture, j’ai eu l’impression de relire un roman qui m’était familier tout en le découvrant totalement. J’avais rencontré Amine en lisant le scénario de Loïc Dauvillier, je le découvrais différemment ou le retrouvais en lisant Khadra. Amine. Les mots de Yasmina Khadra le transcende, je l’ai découvert plus vivant que je ne l’avais perçu initialement, plus en colère, plus irresponsable aussi.  Un homme si obstiné que même ses proches (amis, famille) ne sont pas en capacité de lui faire entendre raison. Un électron libre qui s’agite dans tous les sens et refuse de voir la dangerosité de la situation dans laquelle il s’enferme.

L’habileté avec laquelle Yasmina Khadra décrit le parcours de cet homme m’a séduite. La subtilité avec laquelle il déplie son récit nous fait passer par moult sensations. Ses propos sont si descriptifs qu’ils nous emportent dans le tourbillon des sentiments de son personnage et avec lui, nous amène à réfléchir sur la notion de couple, de valeurs, d’amitié, de filiation, de traditions, de racisme et de croyances. Dans les dernières pages du roman, on pourra lire les termes de voyage initiatique. Car telle est bien la dynamique engagée par cet homme qui force le destin et remet en cause tout ce en quoi il croyait jusque-là.

Il n’y a que deux extrêmes dans la folie des hommes. L’instant où l’on prend conscience de son impuissance, et celui où l’on prend conscience de la vulnérabilité des autres. Il s’agit d’assumer sa folie, ou de la subir.

PictoOKSuperbe roman de Yasmina Khadra. Je vous sais déjà nombreux à l’avoir apprécié. Ce que j’en retiendrais, c’est un voyage au cœur d’un pays tiraillé depuis des siècles et un homme impuissant face à la situation qu’il est amené à gérer.

Dorénavant j’ai une satisfaction, j’ai la certitude qu’il est préférable de lire l’adaptation de Loïc Dauvillier et Glen Chapron avant de lire l’œuvre originelle. Cela m’a permis de m’aventurer en terrain connu tout en découvrant presque totalement le récit. Mais je voudrais aussi saluer la qualité du travail de Dauvillier qui a contribué à donner une seconde vie à ce roman tout en ne déflorant ni son essence ni sa substantifique moelle.

Un très bel ouvrage. Si ce n’est déjà fait, je vous invite à le lire à votre tour. De mon côté, je viens d’acheter Les hirondelles de Kaboul

Une lecture commune que je partage avec Nahe (je te remercie encore de m’avoir offert ce roman !!) et Cristie.

Du côté des challenges :

Tour du Monde en 8 ans : Algérie

Tour du Monde en 8 ans
Tour du Monde en 8 ans

Extraits :

« Il est toujours content lorsqu’on lui rend visite. Pour lui, c’est comme si on le ressuscitait. Il vit en ermite malgré lui, oublié dans sa maison qu’il avait construite de ses mains, au milieu de ses livres et de ses photos racontant de long en large les horreurs de la Shoah. Aussi quand un parent ou un ami vient frapper à sa porte, c’est comme si on soulevait la trappe sous laquelle il se terre pour mettre un peu de lumière dans sa nuit » (L’attentat).

« Un islamiste est un militant politique. Il n’a qu’une seule ambition : instaurer un Etat théocratique dans son pays et jouir pleinement de sa souveraineté et de son indépendance… Un intégriste est un djihadiste jusqu’au-boutiste. Il ne croit pas à la souveraineté des Etats musulmans ni à leur autonomie. Pour lui, ce sont des Etats vassaux qui seront appelés à se dissoudre au profit d’un seul califat. Car l’intégriste rêve d’une ouma une et indivisible qui s’étendrait de l’Indonésie au Maroc pour, à défaut de convertir l’Occident à l’islam, l’assujettir ou le détruire » (L’attentat).

« Je ne comprendrais jamais pourquoi les survivants d’un drame se sentent obligés de faire croire qu’ils sont plus à plaindre que ceux qui y ont laissé leur peau » (L’attentat).

L’attentat

Editeur : Pocket

Auteur : Yasmina KHADRA

Dépôt légal : janvier 2011 (1è édition en 2005 chez Julliard)

ISBN : 978-2-266-20497-2