Jennifer respire la joie de vivre… du moins c’est ce que l’on ressent quand on l’aperçoit. Elle évolue avec nonchalance au milieu des herbes folles d’une prairie, sourire aux lèvres, heureuse de profiter de la douce chaleur des rayons du soleil. Pourtant, la vie de Jennifer n’a pas été sans heurts. Issue d’une famille d’immigrés norvégiens, elle est née aux Etats-Unis. Elle n’a jamais connu ses parents lorsqu’ils étaient ensemble. Quand sa mère était enceinte d’elle, elle vivait en Corée avec le père de Jennifer. Puis, pour une raison qu’elle ignore, sa mère a quitté la Corée, laissant son père sur place pour revenir habiter dans sa ville natale du Minnesota. Elle accouche de Jennifer quelques semaines plus tard.
Elle a grandi dans un environnement douillet mais a toujours été tiraillée par la question de savoir qui est (était ?) son père, pourquoi ses parents se sont-ils séparés et pourquoi sa grand-mère maternelle nourrit-elle des sentiments si haineux à l’égard de Jim (le père de Jennifer) ? Après ses études, Jennifer fait le choix de se rendre en Corée pour un séjour. Elle y retrouve des amis mais le but de son voyage est de retrouver son père ou du moins, retrouver sa trace, rencontrer d’anciens soldats qui – comme lui – ont couverts le conflit armé orchestré par les Etats-Unis. Jennifer souhaite comprendre.
A cette occasion, elle découvre un pays et ses habitants. Elle fait finalement le choix de s’y installer et de travailler dans un orphelinat. C’est dans ce contexte professionnel qu’elle fait la connaissance de Aron et Helen, un jeune couple américain qui désirent adopter un enfant. Helen est stérile, l’adoption est une évidence pour eux. Le dossier d’adoption les a « désignés » pour adopter Kim, un petit garçon d’environ quatre ans.
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Jung traite plusieurs sujets de front : les traumatismes que les conflits armés peuvent générer chez les soldats, la situation en Corée du Sud où de nombreuses mères sont contraintes d’abandonner leur enfant, la filiation, l’adoption…
J’ai rencontré des mamans coréennes, souvent très jeunes, obligées par leur famille de laisser leur enfant à l’orphelinat. Les moyens de contraception, à l’époque, n’étaient pas très efficaces. En Corée, un enfant hors mariage est une honte. Pour pouvoir se refaire une vie, et espérer un meilleur avenir pour leur enfant, beaucoup de mères célibataires venaient à l’orphelinat. Je n’oublierai pas le jour où Kim est arrivé, accompagné de sa jeune maman… En pleurs, elle m’a demandé de lui donner à manger. Elle l’a serré fort dans ses bras en lui disant qu’elle l’aimait, puis elle est partie. J’ai appris plus tard qu’elle avait mis fin à ses jours, par culpabilité. Tout est inscrit dans le dossier d’adoption de Kim. On peut y lire que sa maman l’aimait…
Plusieurs récits s’enchevêtrent, celui de Jennifer et de Kim, celui de Kim et de ses parents adoptifs, celui de Jim (le père de Jennifer) ou de Douglas (l’oncle maternel de Kim)… Des liens invisibles se tissent entre leurs différents parcours, des liens d’amitié naissent au moment où l’on s’y attend le moins, des histoires d’amour se font et se défont… Le scénario leur donne tour à tour la parole, les porte et les met en valeur, souligne la tendresse d’un moment ou la détresse d’un homme. Spectateur, le lecteur se saisit de chaque bribe de texte, investit les personnages, aimerait les réconforter parfois et les encourager à d’autres moments. Jung, que l’on connaît déjà pour nous avoir livré un triptyque touchant sur l’adoption (« Couleur de Peau miel ») a installé une ambiance narrative très sereine. A l’aide d’une voix-off – souvent celle du personnage principal (Jennifer) – l’auteur pose un à un les éléments de récit. Le ton est juste et s’appuie sur de nombreux silences. La voix-off tout comme les dialogues sont laconiques et laissent au lecteur le soin de faire ce travail de réflexion quant aux thèmes qui sont abordés dans cet album.
Je m’attendais pourtant à un album plus consistant, à une prise de position plus franche de la part de l’auteur. Jung développe en fait plusieurs sujets de front et si le propos est pertinent, il reste malgré tout en suspens. La seule moue que j’ai eue durant la lecture concerne un passage du dernier tiers de l’album où le propos devient assez didactique ce qui contraste assez avec la tranche de vie que l’on suivait jusqu’à présent. En revanche, un autre passage m’a marquée et émue. Il s’agit d’un échange entre un enfant et sa mère adoptive qui est superbement illustré par l’auteur (vous pouvez découvrir le texte « Le nombril » sur le blog « Petites conversations autour de l’adoption »).
La chronique de Moka.
Du côté des challenges :
Petit Bac 2015 / Animal : phœnix
Le Voyage de Phoenix
One shot
Editeur : Soleil
Collection : Quadrants
Dessinateur / Scénariste : JUNG
Dépôt légal : octobre 2015
ISBN : 978-2-302-04785-3
Bulles bulles bulles…
J’avais adoré « couleur de peau : miel » alors je lirai celle-ci 🙂
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Au final, je n’ai pas terminé « Couleur de peau miel ». Je n’ai pas lu le tome 3 qui est sorti bien après les deux premiers et si j’avais bien aimé le tome 2, j’étais sortie mitigée du second tome.
Celui-ci est différent bien qu’il aborde une nouvelle fois la question de l’adoption et celle de la filiation. Un bel album en tout cas
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Suis en train de savourer les « couleur de peau: miel » et on verra après pour celui – ci. Mais ce qui est sûr, c’est que j’aime beaucoup son coup de crayon.
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Il y a beaucoup de douceur et de tendresse dans ces deux univers. Peut-être devras-tu laisser passer un peu de temps pour découvrir « Le voyage de Phoenix »… car si tu le lis juste après « Couleur de peau : miel », je crains que tu y trouves beaucoup de redondances
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Pas mal, pas mal la chronique … ok, je sors 😀
Nous en avons bien papoté de cette BD, je te dois quand même ce commentaire ^-^ . De nombreux fils à suivre, tous prenants sans s’y emmêler, une véritable attention à chacun des personnages. Un album sur la filiation, la paternité, plus exactement sur les origines et cette résilience, le ton juste, oui, et bien d’accord avec ton expression » travail du lecteur » qui, pour moi, justifie cette distance dans la narration. ce sont des récits à hauteur d’hommes ( d’enfant-d’enfance ? ) qui nous sont confiés. Comme toi, très touchée par la mise en images de l’adoption maternelle, et bémol sur » l’épilogue « , de trop.
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Je l’ai relu depuis que nous en avons parlé ensemble. Intriguée par cette question de personnage principal dont tu me parlais. C’est vrai que Douglas permet la rencontre de tous les protagonistes… il pose les pions sur l’échiquier narratif tandis que Jennifer agit en permanence. Bref, j’aime tous ces fils à délier. Et puis j’aime en parler avec toi 😉
Merci pour tous ces échanges 😀
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Je vais commencé par « Couleur peau de miel » dont les trois tomes prennent la poussière sur mes étagères depuis…. pffff… bien trop longtemps 🙂
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J’ai déjà entendu ça quelque part 😛
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C’est beau, la thématique me plait, on verra 😉 espère la trouver à la BDthèque !
bisous copine ❤
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On verra. En attendant, je te souhaite un « bon lundi glagla » 😛 😀
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Je le conseille tout le temps ce titre. Il est merveilleux.
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Oui, d’autant qu’il y a plusieurs sens de lecture à donner, en fonction de la manière dont on se positionne à l’égard des personnages et des différents sujets qui sont abordés par Jung
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Il me la faut, tu penses bien !
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Je pense que cet album te plaira 😉
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Une belle note de lecture Mo, je vais partager le FB sur le groupe du Challenge coréen 😉
Bonne fin de semaine et bon weekend.
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Merci à toi 🙂 J’avais eu ton mail concernant le challenge mais depuis l’année dernière, je suis moins régulière avec le blog 😉
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