Le combat ordinaire (Larcenet)

Le Combat ordinaire, tome 1
Larcenet © Dargaud – 2003
Le Combat ordinaire, tome 2
Larcenet © Dargaud – 2004
Le Combat ordinaire, tome 3
Larcenet © Dargaud – 2006
Le Combat ordinaire, tome 4
Larcenet © Dargaud – 2008

Début des années 2000.

Il s’appelle Marco, il est photographe, célibataire et vit dans e trou du cul du monde. On fait sa connaissance en pleine séance de thérapie. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il est sensible à ce qui l’entoure et assez émotif. En un saut de case, il peut passer du rire aux larmes, de l’ironie au grand moment de solitude (au sens propre comme au sens figuré).

Sur le quatrième de couverture il est écrit : « c’est l’histoire d’un photographe fatigué, d’une fille patiente, d’horreurs banales et d’un chat pénible ».

Je commencerais par dire que c’est une perle. Attention : BD incontournable !!

Qui dit Manu Larcenet dit Bill Baroud, Nic Oumouk pour les plus connus. Le dessin des albums est simple, convivial, il va à l’essentiel. Le Combat ordinaire me faisait de l’œil depuis un moment et j’ai profité de la sortie du dernier tome pour l’acheter. Pourtant, le style de dessin n’est pas forcément celui vers lequel je me tourne spontanément.

A la première lecture, le plaisir de la découverte bien sûr, mais surtout la sensation d’avoir dans les mains une œuvre profondément humaine. J’ai apprécié la désinvolture des personnages. Le style de dessin est sans fioritures aucunes mais les personnages qui évoluent dans le Combat ordinaire sont d’une sincérité et d’un réalisme incroyables. Ce sont des gens banals, qui mènent des vies banales… qui nous touchent. La peur, la mort, l’amour, la colère… le chômage, la pauvreté, la guerre, Le Pen au premier tour des élections de 2002… on vit tout ça tour à tour sans avoir l’impression d’être bernés par le récit.

La série sonne juste, elle se positionne et n’hésite pas à se remettre en question. Mais à la première lecture, je ne m’étais arrêtée que sur la forme (pas la forme physique hein, qu’on ne se trompe pas !). Bref, j’avais rangé cette série dans ma bibliothèque personnelle… et puis j’ai eu envie de la relire.

A la seconde lecture, même impression, sauf que quelque chose de nouveau m’a sauté aux yeux. Il y a bien les personnages qui évoluent, qui mûrissent, et à qui on s’attache. Il y a bien ces petits événements qui font que la vie est ce qu’elle est, il y a bien ce style de dessin minimaliste qui paye pas de mine si on ne prend pas le temps de se poser avec la BD. Les couleurs ne sont pas là seulement pour enjoliver la chose. Elles apportent au scénario et au dessin une foultitude de petits détails, elle situent l’état d’esprit de Marco (personnage principal).

C’est donc sur le fond que je veux m’arrêter ici. Il y a dans cette œuvre une technicité qui me laisse pantoise et qui, comparée à mes autres lectures, n’a jamais été aussi maîtrisée. Prenez le temps de la lire, ou de la relire. J’imagine cependant fort aisément ne pas être la seule à avoir remarqué cela, mais je me berce d’illusions, en état d’extase (attention : lecteur heureux !).

Je vais prendre le temps de vous dépeindre cela. On repère rapidement dans le développement de l’histoire que Marco a des crises d’angoisses. Dans ce cas, les fonds de cases deviennent rouge. Il est mal. L’ambiance des cases : noir-blanc-rouge. On verra aussi rapidement qu’il fait des introversions et que pour ces périodes-là les fonds de cases sont en noir et blanc. Maintenant, je vais essayer de me rendre compréhensible pour la suite des choses.

Dans le Combat ordinaire, on manie les extrêmes en permanence : d’un Marco euphorique à l’idée de retrouver ses amis de l’usine, le temps d’un reportage photos, à la situation de précarité dans lesquels ces derniers se trouvent. De la tristesse de perdre un être cher au soulagement de ne pas à avoir à revivre cet événement. On est face à un subtile dosage :

Le Combat ordinaire – Larcenet © Dargaud – 2003 à 2008

Ce que j’ai le plus apprécié, c’est le travail de fourmis que les frères Larcenet (Patrice à la couleur) ont fait afin de permettre une écriture à double vitesse. Concrètement, j’ai remarqué que la couleur des fonds de cases coïncide avec l’état d’esprit du personnage principal. Du coup, les couleurs utilisées font venir à l’esprit des expressions toutes faites. On voit Marco « rigoler jaune » et passer une « nuit blanche ». On le voit « voir la vie en rose » et deux cases plus loin être « vert de peur ». On le voit montrer « pattes blanches » et j’en passe et des meilleures.

Cela permet aussi de soulager le scénario, d’avoir des dessins qui vont à l’essentiel et d’être embarqué dans l’histoire très rapidement.

Les couleurs, c’est le petit bonus. C’est la bande-sons de la BD ou la 3D, comme vous voulez. On a le sens propre et le sens figuré au sein d’une même case, le tout agrémenté de dialogues intelligents et qui ne sont pas piqués des vers. Le ton est direct et juste. C’est fendard.

Le tome 1 fut Lauréat du Fauve d’Or d’Angoulême en 2004.

Le tome 2 a obtenu, en 2005, le Prix Tournesol et le Prix du Jury Œcuménique de la Bande Dessinée.

PictoOKPictoOKA lire, à lire et à lire. Et pour mieux vous rendre compte de tout ce que je vous ais dit, je vous invite à aller vous en rendre compte de vous même ! Les teintes de couleurs nous signifient donc tour-à-tour la tension, la peur, la tristesse, la joie… C’est un gros boulot qui a été fait. Jamais je n’avais autant prêté autant attention à l’utilisation des couleurs.

Le Combat Ordinaire, c’est une délicieuse recette : un soupçon d’autobiographie, une once de fiction, une pointe d’humour. Vous remuez le tout en l’agrémentant d’un regard critique sur une société en mal de vivre. On y retrouvera forcément des stéréotypes (les chasseurs sont des cons, les mères sont inquiètes…), mais le style est agréable. Il y a d’autres représentations auxquelles Larcenet fait référence. Celles avec les animaux. L’exemple le plus flagrant concerne son ami de chantier, Pablo, qui est présenté comme quelqu’un de réfléchit, de posé. Mais je ne m’attaquerais pas aux symboliques animales.

J’ai fait une page sur le blog où j’ai mis de côté ce que j’ai trouvé sur la symbolique des couleurs.

« La fuite fait partie du combat »

Le Combat ordinaire

Roaarrr Challenge
Roaarrr Challenge

4 tomes

Série finie

Éditeur : Dargaud

Dessinateur / Scénariste : Manu LARCENET

Dépôt légal : de mars 2003 à mars 2008

ISBN : voir fiche série sur le site de l’éditeur

Bulles bulles bulles…

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Le Combat ordinaire – Larcenet © Dargaud – 2003 à 2008

Auteur : Mo'

Chroniques BD sur https://chezmo.wordpress.com/

14 réflexions sur « Le combat ordinaire (Larcenet) »

  1. Salut la fée (je vais pas dire « salut la morue » quand même mdr,je te souhaite un bon anniversaire pour ce blog que je trouve assez énorme, tu dois y passer beaucoup de temps je pense. Bravo pour ton travail, c’est complet et bien présenté!Merci pour tes coms sur mon blog, je te met dans mes liens de suite!! A bientôt ^^

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  2. Ai aussi adoré cette bd. Je n’avais absolument pas remarqué ce truc avec les couleurs, du coup je m’en vais les relire, histoire de voir si ça se confirme. Merci ^^

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